Ce que Nelson Mandela pensait des Etats-Unis et d’Israël
Même mort, Mandela aura réussi à isoler Israël du reste du monde, une fois encore. Alors que l’hommage au combattant qui mit fin à l’apartheid a pris une dimension planétaire avec le déplacement de la plupart des dirigeants à ses obsèques, Israël était pratiquement absent «à cause du coût du voyage». La ficelle est trop grosse. Pour Mandela, le régime d’apartheid et le sionisme étaient de la même nature. Il a soutenu ouvertement la lutte des Palestiniens et l’a publiquement confirmé à plusieurs reprises, notamment dans un discours prononcé en 1999 devant des journalistes. Il déclarait : «Israël devrait se retirer de toutes les zones qu’il a conquises aux dépens des Arabes en 1967, et, en particulier, Israël devrait de retirer complètement du plateau du Golan, du Sud Liban et de la Cisjordanie.» Or, Israël assimile toute demande de retrait des territoires qu’il occupe à un acte hostile. Netanyahou et Pérès ne l’ont pas oublié. Pour sa part, Obama savait ce que Mandela pensait des Etats-Unis, mais le pragmatisme dicté par leurs intérêts l’emporte, chez les Américains, sur toute autre considération. Avant l’invasion de l’Irak, Mandela dévoila la principale motivation de l’ex-président George W. Bush, c'est-à-dire le pétrole. Son jugement était d’une rare sévérité : «S’il y a un pays qui a commis des atrocités indicibles dans le monde, c’est bien les Etats-Unis d’Amérique. Ils n’ont rien à faire des êtres humains.» Au moment où les Etats-Unis préparaient leur invasion massive en 2002, Mandela déclara à Newsweek : «Si l’on étudie ces choses, on arrive à la conclusion que le comportement des Etats-Unis d’Amérique est une menace pour la paix dans le monde.» Après avoir lu ces citations, on devine quels sont les pays que Mandela considérait comme amis. Cuba, par exemple, où Mandela a rencontré Fidel Castro en 1991, et où il a prononcé un discours intitulé «Comme nous sommes allés loin, nous autres, esclaves», dans lequel il rendit hommage à la «place toute spéciale» de Cuba dans le cœur des Africains, sa révolution et tout le chemin parcouru par ce lointain pays. Il déclarait : «Depuis les premiers jours, la révolution cubaine a également été une source d’inspiration pour toutes les personnes éprises de liberté. Nous admirons les sacrifices du peuple cubain pour maintenir sa propre indépendance et sa souveraineté face à la sinistre campagne impérialiste orchestrée dans le but de détruire les avancées impressionnantes réalisées au cours de la révolution cubaine… Vive la révolution cubaine ! Longue vie au camarade Fidel Castro !» La Libye, aussi, amie de Mandela, d’autant plus qu’elle subissait en 1997 de dures sanctions imposées par l’ONU. «Il est de notre devoir d’aider fraternellement ce dirigeant, surtout en ce qui concerne les sanctions qui ne le frappent pas lui, mais plutôt la masse des gens anonymes, nos frères et sœurs africains», déclara Mandela en parlant de Mouammar Kadhafi. Le leader libyen, lui-même, était un soutien de longue date de Mandela. Et la Palestine. A l’occasion de la Journée internationale de solidarité avec le peuple palestinien, le 4 décembre 1997, Mandela rassembla un groupe «en qualité de Sud-Africains, de Palestiniens qui sont nos hôtes, et d’humanistes, pour exprimer notre solidarité avec le peuple de Palestine». Il lança un appel pour que les flammes métaphoriques de la solidarité, de la justice et de la liberté soient toutes allumées. «L’ONU a adopté une position forte contre l’apartheid, et avec les années, un consensus international s’est constitué et a contribué à mettre fin à ce système injuste. Mais nous savons bien que notre liberté est incomplète sans la liberté des Palestiniens». C’était cela Mandela, un militant intransigeant sur le soutien aux causes justes dans le monde, y compris, on a tendance à l’oublier, celle de la lutte du peuple sahraoui.
Karim Bouali
Voir également : «Comment feu Nelson Mandela s’est inspiré de la révolution armée algérienne»
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