Le ministre des Ressources en eau défend le gaz de schiste
La décision est prise, et elle semble irrévocable : l'Algérie exploitera bel et bien ses gisements de gaz de schiste, quel que soit le prix à payer. Après, donc, le ministre de l’Energie et des Mines, Youcef Yousfi, c’est le premier responsable du département des Ressources en eau, Hocine Necib, qui commence à en faire son cheval de bataille, plaidant mordicus en faveur d’un début d’exploitation de cette ressource dans les plus brefs délais. Cette position, il l’a une nouvelle fois martelée lundi soir à l’occasion d’une émission à laquelle il a participé sur Canal Algérie. Ce ministre semble se découvrir un nouveau rôle qui ne lui sied pas du tout. En tant que premier responsable du secteur de l’eau en Algérie, il devrait plutôt avoir pour vocation d’appeler à plus de prudence dans le traitement de la question de l’exploitation des gaz et pétrole de schiste. Youcef Yousfi, en tant que ministre de l’Energie, paraît dans son rôle lorsqu’il évoque les bénéfices que l’Algérie peut tirer de cette ressource non conventionnelle. En revanche, voir le ministre chargé d'un secteur appelé à payer une facture lourde d’une exploitation effrénée des gisements de gaz de schiste, en raison des risques de pollution que cela fait peser sur les nappes phréatiques, participe d’un déphasage pour le moins criard. Qu’est-ce qui pourrait expliquer cette cavalcade d’un ministre, visiblement très pressé de faire passer une pilule que beaucoup d’Algériens n’arrivent pas encore à admettre ? M. Necib n’a vraisemblablement pas le sens de la mesure. Sinon, comment expliquer qu’en décembre 2012, c’est-à-dire il y a une année, il était déjà le défenseur impénitent de l’exploitation à grande échelle du gaz et du pétrole de schiste, alors que le débat national autour de cette question fondamentale n’est pas encore tranché. Au cours d’une de ses visites sur le terrain à cette période-là, il tonnait à qui voulait bien le croire que l’extraction de cette énergie non conventionnelle par la technique dite de fracturation hydraulique, sollicitant l’usage de quantités importantes d’eau et des produits chimiques très dangereux, n’aura aucune conséquence sur la qualité de la ressource, encore moins sur le volume des réserves hydriques du pays. «Nous nous sommes concertés avec nos collègues du secteur de l’Energie qui nous ont indiqué que les gisements de gaz de schiste ciblés ne se situent pas dans les zones aquifères qui alimentent l’espace agricole et la population. Nos collègues de l’Energie nous ont donné des garanties que l’eau qui sera injectée pour l’extraction du gaz de schiste sera récupérée, recyclée et réutilisée», répondait-il d’ailleurs, un brin naïf, tentant de rassurer les défenseurs de l’environnement qui ne cachent pas leur inquiétude quant à la perspective de l’exploitation intensive du nouveau combustible. En juin dernier, lors d’une conférence de presse, c’est une nouvelle fois lui que le gouvernement Sellal envoie au charbon pour affirmer que l’exploitation du gaz de schiste «est une option stratégique décidée par l’Algérie, et ça fait partie de la stratégie énergétique du pays». «C’est une option stratégique et l’Algérie a décidé souverainement d’aller vers l’exploitation du gaz de schiste», insistait-il encore comme pour marteler qu’aucun débat possible autour de la question n’était de mise.
A. Sadek
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