Liberté ouvre la voie
Par Kamel Moulfi – «Seule la lutte paie.» C’était le credo de Redouane Osmane. C’est valable pour le corps des enseignants dont il faisait partie autant que pour les journalistes de Liberté, journal privé, qui viennent juste d’arracher un accord salarial pour lequel ils se sont battus. Sans la grève qu’ils ont observée, déclenchée tel un coup de semonce, et la menace d’y recourir encore, les travailleurs de Liberté auraient terminé la fin de l’année avec les mêmes revenus assortis de promesses entretenues par des négociations qui sont destinées moins à aboutir à un accord satisfaisant pour eux qu’à faire traîner les choses en longueur pour les lasser et les amener à abandonner leurs revendications, ou, au mieux, les atténuer. L’exemple du quotidien Liberté montre que rien n’est offert de plein gré aux travailleurs par le patronat privé, qu’il s’agisse d’un journal ou d’une autre entreprise. Dans le cas des journaux, la nature de l’activité permet une transparence qui n’existe pas dans d’autres secteurs, y compris quand la part de l’informel est prépondérante, et c’est le cas de nombre de nouveaux titres. Les sources des recettes sont connues – essentiellement publicitaires et accessoirement les ventes –, les dépenses sont facilement situées, en grande partie les charges de fonctionnement. C’est, sans doute, à un jeu d’enfants que se sont amusés les syndicalistes du journal Liberté pour estimer la surface publicitaire vendue, calculer ses rentrées financières et, après déduction du coût d’impression et des salaires, avoir une idée de ce que ça rapporte au patron. Et en comparant avec ce qu'ils touchent, en conclure à quel point ils sont exploités et décider de ce qu’ils peuvent demander. Dans le cas de Liberté qui est la propriété de l’homme d’affaires Issad Rebrab, dont la prospérité financière est notoirement connue, aucun argument sérieux ne pouvait être opposé aux revendications des journalistes. Ils ont ouvert, à d’autres, la voie pour de nouveaux combats.
K. M.
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