Un citoyen algérien répond aux allégations de François Gèze sur l’arrêt du processus électoral
Si on sait aujourd'hui ce que nous a coûté l’interruption du second tour des élections de janvier 1992, il est aisé de deviner, par les exemples à travers le monde, en Afghanistan, en Irak, en Somalie, en Libye, en Syrie et au Mali, ce que ceux qui utilisent l’islam [à des fins politiques] auraient fait de l'Algérie, et comment les forces armées algériennes dont l’intervention était réclamée par la société civile, dont l'UGTA que dirigeait Abdelhak Benhmouda, ont épargné l'Algérie. Vous confondez sciemment ou inconsciemment islam et islamisme.
Cette confusion entretenue par les islamistes et certains intellectuels qui sont à la solde du grand capital, dont l’un des dirigeants en verve est Netanyahou, puisqu’il ose jusqu’à ce jour défier les plus grands, est un leurre de guerre. Faut-il préciser que la lutte n’est pas entre une classe ouvrière et une classe bourgeoise, mais une guerre entre le grand capital qui instrumentalise les religions, dont l’islam, pour mener la guerre aux nations et non aux royaumes, dont la religion est l’islam ? La guerre que livrent les islamistes à l’Egypte et à la Tunisie actuellement rappelle celle que leurs acolytes avaient livrée à l’Algérie avant et après l’arrêt du second tour des élections législatives de 1991/1992. L’arrêt du vote est certes une violence, mais une violence nécessaire, malheureusement, comme est nécessaire l’existence même des forces armée dans une nation. Je suis de ceux qui ont distribué des tracts signés par le PAGS qui disaient : «Citoyennes, citoyens, qui ne voulez pas d’un pouvoir totalitaire, vous êtes majoritaires, refusez de livrer l’Algérie au FIS, non au second tour ! Exigez l’annulation des élections et l’interdiction de tous les partis intégristes comme le prévoit la Constitution !»
Le mauvais calcul de Chadli est d’avoir voulu partager le pouvoir avec le FIS. Mais ce dernier ne l’a pas entendu ainsi. Le divin qu’il a invité à la politique lui a fait une razzia et l’a poussé à la démission. Les intellectuels qui vont jusqu’à confondre islam et islamisme devraient être les premiers à comprendre que la légalisation d’un parti qui prône la loi divine, qui qualifie tous les gestes au quotidien de licite ou d’illicite, est anticonstitutionnelle. Pourquoi le premier tour, me diriez-vous ? Effectivement, pourquoi les forces politiques sorties de la longue nuit du parti unique et de la pensée monolithique n’avaient-ils pas jugé à temps cette légalisation criminelle, excepté le FFS ? C’est une erreur fatale qui devait être réparée au plus vite, et seule l’Armée nationale pouvait s’en charger avant qu’une autre armée étrangère ne le fasse pour d’autres raisons propres aux ONG qui sévissent au Mali, en Libye et ailleurs.
L’actuel président, M. Bouteflika, s’est enfermé comme ses prédécesseurs dans la politique du système dont la première caractéristique est l’anti-démocratie. Ce n’est pas, comme on veut nous le faire croire, à cause de l’armée ou des services de sécurité, mais parce que ce système antidémocratique ne lui permet pas d’aller à l’encontre des intérêts étroit des importateurs et autres rentiers qui obligent tous les hommes politiques sans ancrage et sans courage à faire à l’instar de Boudiaf une rupture avec ces lâches concessions politiques et économiques. Effectivement, on peut affirmer que l’Algérie manque cruellement de liberté et de démocratie, mais ce n’est pas une raison pour vouloir l’enfermer dans une théocratie. Les islamistes avaient comme stratégie la terreur et ils ont tenté sans succès de démonopoliser la violence pour régner plus facilement. Ils terrorisaient toutes celles et tous ceux qui non seulement ne pensaient pas comme eux, mais aussi qui ne s’habillaient pas comme eux. Faut-il rappeler qu’ils ont commencé par tuer des civils, les intellectuels d’abord ?
Saâdeddine Kouidri
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