Al-Jazeera crée une chaîne turcophone pour sauver Erdogan
Embourbé dans les scandales de corruption touchant son entourage immédiat et accusé d’autoritarisme et de tentative de mettre au pas la justice de son pays, le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdoga, semble avoir trouvé une bouée de sauvetage au moment où il est en perte de vitesse dans les sondages. Le groupe Al-Jazeera, le parrain des mouvements islamistes les plus radicaux du monde arabe, est venu à la rescousse des responsables de l’AKP turc, réussissant à s’introduire dans la scène médiatique locale, et même au-delà, en mettant à leur disposition un instrument de propagande : Al-Jazeera Türk. Chassés d’Egypte où le nouveau pouvoir n’a pas du tout accepté l’encouragement de la subversion, et les ingérences et la partialité dont la chaîne de télévision a fait preuve en faveur des Frères musulmans, les Qataris semblent avoir trouvé un terrain de rechange pour leur propagande islamo-terroriste. La chaîne avait déjà subi le même sort en Algérie et au Maroc. En revanche, le pouvoir islamiste en Turquie, qui a tellement besoin d’aide en ces temps d’incertitude et de pics d’impopularité, lui ouvre grand les bras pour lui permettre de s’installer sur la scène médiatique turcophone et poursuivre, ainsi, sa politique de nuisance. Ses responsables voient déjà grand, comme l’explique le directeur général d'Al-Jazeera Türk, Ismail Kızılbay, qui décrit le canal comme « un développement novateur en termes de diffusion de nouvelles en Turquie». «Nous avons défini notre public cible dans les régions où le turc est parlé, Turquie notamment. Cela signifie environ 130 000 000 à 140 000 000 de personnes en Europe, dans les Balkans, le Caucase, l'Asie centrale et le Moyen-Orient.» Et lorsque ce responsable tente de rassurer l’opinion quant à l’impartialité dans le traitement de l’information et des événements, il se découvre rapidement et peut-être sans s’en rendre compte. « …Et toujours être du côté des gens seront les piliers de base de nos rapports», finit-il, en effet, par lâcher. Que signifie «toujours être du côté des gens», lorsqu’on sait qu’une opinion ne représente qu’une partie, au moins, de la vérité ? Les avis peuvent diverger au sein de n’importe quelle opinion publique sur des sujets divers. Si on veut paraître impartial, il faut donc laisser s’exprimer toutes les opinions. Ce qui ne semble pas être déjà le cas pour la nouvelle chaîne d’Al-Jazeera qui s’apprête à conquérir le territoire turcophone. Mais les téléspectateurs, dans cette région, sont loin d’être dupes. Ils savent déjà ce que la propagande qatarie a fait comme dégâts dans les pays arabes. Un homme averti en vaut mille, dit-on.
Amine Sadek
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