La vraie histoire d’Amar Saïdani : la toute-puissance de la Sécurité militaire au service du caïd local (III)
Après avoir réussi à amasser un joli magot, Saïdani voulait le pouvoir. Du moins local pour commencer. Il a compris après son épisode à l’UGTA qu’il ne pourrait imposer sa loi à El-Oued que grâce à des réseaux politiques (FLN) et militaires (SM). C’est vers ces deux directions qu’il se tourne pour réaliser ses desseins. Il commence par se rapprocher du chef d’antenne de la Sécurité militaire d’El-Oued, un certain commandant El-Hachemi, avec lequel il se lie d’amitié. Pris sous son aile, Saïdani finit par devenir une terreur locale. Ainsi, celui qui dénigre aujourd’hui le DRS, appelant à son démantèlement, et qui se fait le chantre d’un «Etat civil», a utilisé la toute-puissance de la Sécurité militaire de l’époque pour se bâtir une impunité de caïd local, craint et brutal. Il fallait d’abord blanchir l’argent de la contrebande qui grossissait à fur et à mesure que le trabendo fleurissait dans la région d’El-Oued. Pour ce faire, Saïdani devient un intermédiaire efficace dans les affaires de la mafia locale. Tout passe par si Amar : lignes de crédit, achats de biens… Vous voulez acquérir une villa, un appartement ou une terre ? Voir si Amar. Dans toutes les transactions des barons locaux, on retrouvait la trace d’Amar Saïdani qui, au passage, n’oublie pas sa famille. Son frère bénéficia d’un crédit d’un milliard de centimes afin d’acquérir une station d’essence connue dans le Tout-El-Oued comme appartenant en toute légitimité à un citoyen qui en fut brutalement dépossédé. Mansouri Abdelhafidh, plus connu sous le nom de Hafa Mhenni, s’est vu éjecter de ses terres et déposséder de sa pompe à essence attribuée à un membre de la «tribu» de si Amar. Car cette station d’essence est la mieux placée de la ville. Elle se trouve devant le marché municipal, ce qui la rend très attractive et plus que rentable. Mais Saïdani ne s’arrête pas là. Grâce aux interventions d’«amis» au sein de l’antenne de la Sécurité militaire et à des pressions sur la direction locale de Naftal, il réussit à obtenir la délocalisation des autres projets de stations d’essence en dehors de la ville. Cette hogra, érigée en règle à El-Oued, a suscité la colère des habitants qui supportaient mal l’intrusion de cet individu dans la vie sociale et politique de la ville. Ce fut le cas de Mme Oum El-Kheir, épouse du docteur Hassan El-Djilani. Cette brave dame, qui était directrice d’école respectée mais surtout secrétaire générale de la section locale de l’Union nationale des femmes algériennes (UNFA), a été expulsée du logement de fonction qu’elle occupait avec sa famille depuis une dizaine d’années. Elle a été jetée à la rue en plein hiver à cause de son opposition bien assumée à l’entrée de la sœur de Saïdani au sein de l’UNFA. Cette dernière y fit une carrière fulgurante, jusqu’à nos jours. Ainsi, grâce à ses appuis dans l’ex-SM, qu’il critique ouvertement aujourd’hui, Saïdani est devenu une figure locale du népotisme. Avec le commandant El-Hachemi, il fit appel à un autre mentor, Kessab Bachir, de son vrai nom Soufi Bachir, né comme Saïdani à Gafsa et dont la famille était appelée «les Benzerti». Ce trio fera la loi durant deux décennies à El-Oued. Ils ont même créé un groupe d’autodéfense qui a fait régner la terreur dans cette wilaya.
Hani Abdi
Demain : Intrigues de bas étage et magouilles organiques au FLN