Les partisans d’un 4e mandat s’apprêtent à sauter du navire pour s’accrocher à une nouvelle bouée
La date butoir du 2 mars approche à grands pas. Le temps presse et le président Bouteflika n’a toujours pas placé un mot dans la cacophonie qui s’est emparée de la scène politique nationale, depuis la convocation du corps électoral pour la présidentielle. Les annonces récurrentes de certains médias et de personnalités politiques proches du cercle présidentiel et partisanes d’un quatrième mandat pour le candidat sortant, d’une «imminente» intervention du chef de l’Etat, équivalent à une vérité de La Palice. Mais cette lapalissade a ses raisons. Le président de la République devra, en effet – contraint par les textes fondamentaux de la République –, s’adresser au peuple sans intermédiaires, pour l’informer de ses intentions par rapport à l’échéance d’avril prochain. Certaines indiscrétions affirment qu’Abdelaziz Bouteflika aurait choisi la date du 24 février pour ce faire et que l’enregistrement audiovisuel serait déjà prêt et n’attendrait que le feu vert du concerné pour sa diffusion le moment venu. Cette façon de procéder, depuis la disparition du Président des écrans, hormis les quelques apparitions toutes protocolaires et destinées à rappeler «à qui de droit» que le pays a toujours un chef à sa tête et que le timonier tient toujours la barre, s’est imposée de fait aux Algériens. Pour des raisons qui demeurent inconnues – jusqu’à ce que le président Bouteflika daigne les expliquer lui-même –, ni ce dernier n’a voulu tirer sa révérence suite à son accident vasculaire cérébral qui l’a gravement amoindri, ni les hautes autorités politiques habilitées n’ont jugé utile de faire appliquer l’article 88 relatif à l’empêchement du président de la République de remplir sa mission. Cette situation inédite depuis l’indépendance du pays a donné lieu à une crispation entre deux clans clairement opposés et risque de conduire le pays vers une dérive aux conséquences incalculables. Le vide créé par l’absence prolongée du président Bouteflika et son éloignement forcé des affaires a permis à une poignée de courtisans intéressés de parler en son nom et, ne voyant aucune réaction venir de sa part pour y mettre un terme, ont troqué leur veste d’acteurs secondaires pour enfiler celle d’interprètes d’un président sans voix dont ils ont traduit le silence par un langage des signes aux prétentions politiques flagrantes. La difficulté d’enregistrement d’un simple discours du président sortant devrait suffire à convaincre ses défenseurs les plus zélés de l’impossibilité, pour lui, de briguer un quatrième mandat, dont les apôtres ont déjà sorti leurs gilets de sauvetage pour sauter du navire dérivant et s’accrocher à la bouée de l’arrivant.
M. Aït Amara