Pour un conseil supérieur de la transition

Telle est la gravité de notre situation intellectuelle que, sur les notions mêmes les plus fondamentales et en apparence les plus faciles, l’ordre appartient aux purs rétrogrades, chez lesquels il demeure sans efficacité tandis que le progrès demeure entièrement anarchique et des lors radicalement stérile. Auguste Comte

Telle est la gravité de notre situation intellectuelle que, sur les notions mêmes les plus fondamentales et en apparence les plus faciles, l’ordre appartient aux purs rétrogrades, chez lesquels il demeure sans efficacité tandis que le progrès demeure entièrement anarchique et des lors radicalement stérile. Auguste Comte
La déclaration de Monsieur Mouloud Hamrouche, tombée à point nommé, nous confirme ce que nous n’avons jamais cessé de clamer : notre pays est en danger, et aussi que toutes les opportunités pour la construction d’un Etat de droit et les contributions des citoyens à ce sujet ont été nombreuses et sans résultat. Aujourd’hui, des flots d’ignominies sont déversés sur l’institution militaire, qui a su, pendant les moments terribles que l’Algérie a connu ces trente dernières années, garder sa cohésion et son esprit de corps. Il reste bien entendu que c’est une armée telle qu’elle devrait être, c'est-à-dire lui permettre d’être une véritable institution de l’Etat de droit, sauvegardant son unité et son intégrité, et la fin de son ingérence dans la vie politique et de son rôle historique d’acteur de la politique algérienne La campagne inventée par un certain nombre de personnes, qui, passant de la «houma à la houkouma», est un exemple type de dissociation, de décérébration et de débilisation de l’Algérie. A ceux qui orchestrent cette campagne, nous leur disons que personne n’est chargé du salut public de l’Algérie et que personne n’incarne la raison nationale.
Mais, enfin, comment agir pour le mieux, car ceux qui orchestrent cette campagne sont à nos yeux ceux qui ont procédé à la déliquescence des institutions de l’Etat et qui maintenant, alors qu’ils avaient allumé le brasier, crient au feu. Devant la cécité du pouvoir et son entêtement à vouloir sauver un système institutionnel et politique moribond, plusieurs opportunités avaient été gaspillées durant ces quinze dernières années. Ses dogmes d’arrière-garde, sa perception rétrograde, son autisme, son mépris et le musellement du peuple ainsi que son aversion pour la démocratie et les libertés ne doivent plus aujourd’hui faire l’impasse sur une alternative qui saura répondre aux attentes des Algériennes et des Algériens. Une alternative, qui, tout en faisant de manière objective le bilan politique de l’Algérie indépendante, leur proposera, à travers une démarche dynamique et fonctionnelle, une autre voie, un autre parcours, une autre évolution. Aujourd’hui, la solution alternative ne pourra générer le consensus des différentes parties, d’une part, et l’adhésion des citoyennes et des citoyens, d’autre part, que si ce processus politique inachevé de réappropriation des libertés fondamentales, individuelles et de construction de la démocratie est réenclenché. Pour cela, la proclamation du 1er Novembre, la plate-forme politique du congrès de la Soummam et les résultats du bilan politique de 1962 à ce jour, à effectuer, doivent être le creuset pour imaginer, concevoir et développer une approche rationnelle, pragmatique et fonctionnelle, en vue d’encourager et d’inciter le peuple algérien à revendiquer l’édification d’un nouvel Etat véritablement démocratique. L’émergence d’un nouvel ordre, l’alternance au pouvoir, les libertés, l’équité, les droits et les obligations ne seront plus de vaines notions ; tout cela dans la sérénité et la préservation des intérêts de chacun sans esprit de haine, ni de règlements de comptes.
Sachant l’aversion que les Algériens ont des élections dont tout le monde s’accorde à dire qu’elles ne pourraient qu’être truquées à l’instar de toutes les élections passées et qu’elles ne serviront à rien, sinon à maintenir le pouvoir en place dans la continuité avec quelques saupoudrages sans effet sur la société. Les Algériens se sont toujours exprimés en signifiant clairement à ceux qui incarnent l’Etat, que le citoyen existe bel et bien dès le moment qu’il pense que ses intérêts ne sont nullement représentés par des gens, qui ne défendent que les intérêts de ceux qui détiennent le pouvoir dans l’Etat
C’est pour ces raisons que l’alternative que nous souhaitons peut se matérialiser par :
1- l’élaboration d’une plate-forme politique pour l’édification d’un ordre institutionnel démocratique ;
2- la détermination des fondements ainsi que la définition des valeurs du projet démocratique pour la société algérienne. Fondements et valeurs qui doivent tenir compte de la réalité socio-politique de la nation algérienne, de son identité à travers ses composantes, de son histoire séculaire et de son appartenance à son espace naturel géostratégique, géopolitique et géoéconomique ;
3- la définition des règles minimales à observer, pour réussir la concrétisation d’un tel projet démocratique.
Il reste bien entendu que le citoyen a besoin de définir sa liberté pour pouvoir s’affranchir dans cette Algérie indépendante depuis 1962. Nous devons être conscient que ce n’est pas en libérant le politique en l’état actuel des choses qu’on aura forcément le développement, la croissance et la stabilité du pays. Or, aujourd’hui, nous sommes toujours un troupeau sans berger, nous sommes une société à l’âge de l’enfance politique. La notion de peuple n’existe que s’il y a des institutions, car le peuple est un résultat et non pas une donnée. Quelles sont les institutions qui font le peuple ? La justice, l’éducation, les partis politiques. En principe, ce sont ces institutions qui formatent le peuple. Est-ce qu’elles existent chez nous ? La source en démocratie c’est le peuple, alors comment une entité qui n’existe pas peut-elle produire des institutions. A la veille des élections présidentielles précédentes qui n’ont servi qu’à aggraver la situation et mener le pays à l’impasse, le Comité d’initiatives et de vigilance citoyennes d’Oran (Civic) s’était prononcé et fait des propositions sur une transition pacifique pour un changement de système politique, qui s’avère plus que jamais nécessaire pour rebâtir ce pays. En l’état actuel de la situation qui prévaut et le danger latent qui guette l’Algérie, nous réitérons notre proposition qui consiste en ce que la démocratisation du pays devra passer nécessairement par un travail de refondation qui pourrait se matérialiser par l’institution de ce qu’on souhaite au plus profond de nous-mêmes, et qu’on pourrait appeler : un conseil supérieur de la transition. Composé d’une vingtaine de personnalités patriotes au-dessus de tout soupçon, il aurait pour mission de créer l’Etat, c'est-à-dire de fabriquer les institutions. «Il n’y a pas un seul Etat au monde où les institutions sont venues directement du ventre de la démocratie qu’on nomme autoritarisme, dictature, libéralisme ou tout ce qu’on voudra», si une feuille de route est établie où seul le président à partir d’un collège est élu, car la transition suppose sélection et tout ce qui est dangereux ou ne croit pas à la démocratie ne passera pas, parce que nous voulons un garant de la Constitution. Or, en Algérie, la constitutionnalité n’est pas une culture, elle n’est pas l’âme de l’Algérie, c’est pour cela qu’il faudrait imposer la norme par en haut et cultiver les valeurs par les bas. Pour arriver à une démocratie réelle, ce président choisira son équipe et commencera à fabriquer les institutions de pilotage ou de guidance de la transition qui ne doivent pas sortir des urnes, mais d’aller vers un consensus élitaire, c'est-à-dire être d’accord sur un groupe de personnalités qui auront la charge de nous gouverner pendant deux ans durant lesquels seront mis en place les bases d’une économie de marché, les institutions, les agents économiques, et on travaillera à mettre en place une véritable classe politique propre, intègre et compétente. L’exercice du pouvoir suppose des actions à mener. Les actions feront-elle l’objet de débats ? Cela ne peut être que positif, parce que le débat a deux fonctions principales dans une transition, c’est une expertise qui doit être faite et la meilleure expertise est celle qui tient compte de l’opinion et de la majorité.
– La première fonction du débat c’est de permettre la généralisation de l’information et de puiser les idées et projets (banque de données).
– La deuxième fonction, c’est un chantier de révélations de personnalités structurantes où les compétences cachées, enfouies seront révélées, c’est là qu’on pourrait pulvériser l’idée que l’Algérie n’a pas de compétences, alors, créons les mécanismes et on sera surpris ! Ce qui suppose la liberté d’expression, la liberté de la presse, l’ouverture des médias audiovisuels, l’égalité devant la loi, la liberté de réunion et d’association, la liberté de culte, le refus de la corruption des fonctionnaires et des élus, le droit de propriété…. Ces débats permettront aussi de définir les mécanismes de méthodologie et de gestion pour l’avènement de la démocratie avec une bonne doctrine en quelques points dont le premier sera dédié à la vie des Algériens qui devra être sacralisée. Nous aussi nous devoir avoir dans la mémoire la sacralité de la vie des Algériens, car nous avons des chouhada, des gens morts pendant la résistance, la colonisation, les morts de la tragédie nationale, etc. Nous ne devons pas dilapider notre capital sang, il faudrait qu’on apprenne à le respecter et il doit être gravé dans le marbre, et aussi définir le gouvernement civil … Cette doctrine aura à élaborer une démarche programmatique décrivant les projets structurants, par exemple définir l’organe de pilotage des institutions de transition, le profil des hommes, la démarche du gouvernement… Et une démarche pragmatique pour exprimer ce qu’il faut faire correctement dans les échéances qui seront fixées… pour l’achèvement des institutions, puisque toute stratégie a un horizon temporel et un horizon spatial.
Enfin, le contrôle devra se faire en réhabilitant le rôle des juges afin que l’application des décisions se fasse avec le plus de justice possible, et, pourquoi ne pas instituer une Haute Cour de justice composée d’une vingtaine de magistrats intègres et compétents en fin de carrière qui seront nommés à vie, car ils ne seront plus tentés par les besoins matériels, et qui seront des sages et les diseurs de normes. Ce sera une institution de pérennisation, ces juges transcenderont, ils ne transgresseront pas, alors qu’aujourd’hui, nous avons des institutions de transgression et dont les nominations se font au gré des allégeances, copinages et du meilleur degré de servilité. Cette institution sera un organe de délibération, car dans une société moderne, la compétition et la délibération marchent ensemble. Là où la compétition est bloquée, la délibération doit trancher pour éviter qu’un groupe prenne le monopole dans la Constitution et devient un danger menaçant pour l’ensemble des institutions.
Enfin, nous restons attentifs au contenu de l’initiative politique annoncée dans la déclaration de Monsieur Mouloud Hamrouche pour contribuer à tout enrichissement, élargir son soutien populaire et garantir son succès dans le sens des intérêts suprêmes de la nation et le bien-être de notre peuple.
«Une poignée d’hommes totalement démunis avaient relevé le défi de libérer le pays du joug colonial, aujourd’hui à cette nouvelle génération de relever le défi pour rebâtir l’Algérie sur la base de la démocratie et des libertés pour un véritable Etat de droit.» Alors, ensemble, osons relever ce défi !
Pour le Civic
Benguesmia Chadly Mohamed

 

Pas de commentaires! Soyez le premier.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.