Pourquoi Ouyahia s’acharne-t-il contre le mouvement Barakat ?
Ahmed Ouyahia, qui n’est plus à présenter, fait partie des six «grosses pointures» du camp présidentiel mobilisées pour arracher un quatrième mandat pour Bouteflika dans l’élection qui se déroulera le 17 avril. Ces six hommes politiques nourrissent d’égales ambitions pour l’après-17 avril… si leur mission est bien remplie, c’est ce qui explique qu’ils rivalisent en surenchères dans la campagne électorale qu’ils sont contraints de mener pour le compte de Bouteflika, empêché par la maladie de le faire lui-même, et c’est ce qui explique aussi une part de jeu personnel qui transparaît dans leurs discours. Certes, il y a une répartition des rôles qui les rend solidaires autour du seul point qui les unit, le quatrième mandat, mais ils n’oublient pas la concurrence qu’il y a entre eux dans cette course au pouvoir, étant profondément divisés sur tout le reste. Dans cette campagne, Ahmed Ouyahia se distingue – c’est peut-être la partition qui lui revient – par ses attaques contre le mouvement Barakat. C’est un aspect de son discours qui ressort nettement de la langue de bois qu’il a le défaut d’utiliser trop souvent. Là où il est passé ce week-end, il s’en est pris vertement à ce mouvement, ne dédaignant pas la récurrence dans ses attaques. Son critère de jugement est la quantité, il s’agit pour lui d’une «poignée de boycotteurs». Il réaffirme, selon les comptes rendus de journalistes, que l’opposition au quatrième mandat affichée par Barakat est un refus de la démocratie, sous-estimant gravement la légitime aspiration des jeunes à une alternance à la tête de l’Etat, alors que, de son côté, Sellal, engagé dans la même campagne, ne cesse de promettre de passer le flambeau aux jeunes. Ouyahia accuse Barakat composé d’éléments de la nouvelle génération de vouloir agir à partir de la rue, alors que les prises de position de ce mouvement insistent sur le caractère pacifique de son action. Personne n’a entendu aucun élément de Barakat se revendiquer de cette tragédie appelée «printemps arabe». Il faut revenir à la lettre de l’ex-président Liamine Zeroual et à son analyse de l’«effervescence» qui monte de la société, faisant ressortir sa dimension patriotique. Plutôt que «fustiger» le mouvement Barakat, Ahmed Ouyahia, en politicien avisé, devrait plutôt le respecter, même s’il persiste à croire, se basant sur la quantité, qu’il n’est pas représentatif, ce qui est sans doute faux.
Karim Bouali