Des médecins convoqués à une rencontre officielle avec le ministre se retrouvent face à Sellal
Décidément, les tenants du pouvoir ne s’encombrent d’aucun scrupule pour mobiliser indûment les ressources de l’Etat et les fonctionnaires des organismes publics dans la campagne électorale pour la présidentielle du 17 avril, animée par les représentants de Bouteflika. Conviés à une rencontre avec le ministre de la Santé, aujourd’hui dimanche à l’hôtel Riadh à Sidi-Fredj, des membres du corps médical et paramédical ont été surpris de se retrouver dans une salle où les attendait le directeur de campagne du président-candidat, Abdelmalek Sellal, pour les haranguer sur le quatrième mandat et chanter les louanges de Bouteflika, dans un meeting de campagne. Les invités, qui étaient munis d’un ordre de mission spécifiant le cadre purement professionnel d’une rencontre normalement prévue avec le ministre, se sont naturellement sentis floués par leur propre administration qui leur a délivré de faux ordres de mission dans le but de les enrôler dans une campagne dont ils ne savaient rien. On a appris que beaucoup d’entre eux ont préféré quitter les lieux, avant même d’attendre le début du discours d’Abdelmalek Sellal. Les médecins ont vivement dénoncé cette tentative d’utiliser le secteur de la santé aux fins d’obtenir un quatrième mandat pour le président Bouteflika. Ils estiment qu’il est «indécent» pour le staff de campagne du président-candidat de chercher à le faire réélire «sur le dos des centaines de milliers de malades, au moment où le secteur se débat dans de graves problèmes». La maladresse du staff de campagne de Bouteflika risque d’exacerber les tensions dans un secteur sensible où les différents syndicats autonomes menacent de reprendre leur mouvement de grève à n’importe quel moment. De nombreuses voix se sont élevées depuis le début de la campagne électorale pour alerter l’opinion publique, mais surtout la Commission nationale de surveillance de l’élection présidentielle, sur la multiplication d’abus commis par le clan présidentiel qui veut imposer son hégémonie sur l’ensemble du processus en cours, en exploitant de façon illimitée et illégale les moyens de l’Etat (transport, médias, infrastructures, etc.) à des fins électorales. Dans le même contexte, nous avons appris, selon des témoignages concordants, que des bus entiers sont mobilisés de wilayas autres que celles où sont programmés les meetings des porte-voix de Bouteflika, pour éviter de se retrouver face à des chaises vides. Ainsi, des citoyens de Jijel se sont réveillés ce matin au milieu d’une nuée de bus immatriculés à Ouargla (30), transportant des citoyens de cette localité du sud du pays pour assister à un meeting prévu dans cette ville côtière. Ces pratiques cachent mal, en tout cas, un manque de confiance flagrant chez les partisans du quatrième mandat.
R. Mahmoudi