Hamrouche : une comparaison incongrue entre les trois «B» et Bouteflika, Gaïd-Salah et Toufik
Pour sa troisième intervention en un mois, Mouloud Hamrouche n’a pas réussi à expliciter le message qu’il voudrait distiller. A force de conceptualiser les choses, de codifier ses appels, il a fini par rendre inintelligible ce qu’il veut décrire comme une alerte à l’opinion publique. Alors qu’une alerte sous-entend qu’il y a péril en la demeure, sur lequel il faudrait sensibiliser le plus grand nombre. «Le pays et le système lui-même sont dans une impasse.» Hamrouche n’explique pas la nature de cette impasse. Il ne dit pas, en l’occurrence, s’il s’agit de cette obstination du pouvoir présidentiel à vouloir se pérenniser, à travers ce 4e mandat, au risque de mettre à mal les institutions du pays ou alors d’un danger qui viendrait de l’opposition à cette même volonté. Or, dans le même message, il implore trois hauts responsables qu’il a nommés – mais sans citer leurs fonctions, déjà une première tare – pour «ériger un consensus et construire un renouveau national de modernisation et de démocratisation», seule solution, selon lui, pour sortir de l’impasse. Il les compare aux trois «B» qui ont créé le GPRA et «accepté de négocier» avec l’occupant l’indépendance du pays, «puis sont partis». Là encore, on ne voit pas la pertinence d’une telle comparaison. Krim Belkacem, Abdelhafid Boussouf et Lakhdar Bentobal n’avaient pas du tout les mêmes positions qu’occupent aujourd’hui Abdelaziz Bouteflika, Ahmed Gaïd-Salah et Mohamed Mediene dit Toufik. Les trois premiers ont, certes, fait leur devoir mais, à la fin, ils ont été politiquement neutralisés par le groupe de Tlemcen ; ils étaient en conflit, mais avec une autre force politico-militaire constituée en dehors du GPRA. Ce qui n’est pas, bien évidemment, le cas des responsables actuels qui dirigent des institutions et qui ne sont pas confrontées aux mêmes hostilités. L’ancien chef de gouvernement sous Chadli fait une proposition lourde de sens, en appelant ces trois piliers de la République à «négocier» une sortie de crise, sans en préciser les termes ni les enjeux réels. Au nom de quoi peuvent-ils le faire ? Au nom des «centres de pouvoir» qu’ils représenteraient ? Il est clair que cela impliquerait la dissolution pure et simple de la République et risque de nous renvoyer à la case de départ. A Tripoli peut-être. Au lieu d’appeler le chef de l’Etat à respecter – et faire respecter – les lois de la République et l’esprit de la Constitution, dont il est le garant, Mouloud Hamrouche veut diluer le débat dans une chimérique quête de la République de Platon. Etait-ce son seul message ?
R. Mahmoudi