Le clan s’auto-victimise
Par M. Aït Amara – Constatant l’échec lamentable de leur stratégie qui a consisté à envahir l’espace public jusqu’à en faire une propriété privée, les animateurs de la campagne électorale du président malade Abdelaziz Bouteflika font une virevolte subite. Du candidat jouissant de la suprématie que lui confèrent l’usage abusif et illégitime des moyens de l’Etat et les milliards qui coulent à flot, Bouteflika et ses six porte-voix n’ont plus d’autre choix que de se présenter comme des victimes face au… peuple ! A Béjaïa, hier, pendant que le très téméraire Abdelmalek Sellal était incapable de se rendre dans la ville, le candidat Benflis, lui, remplissait la salle à ras bord plus à l’est, à Batna. Voilà donc où en est, à sa deuxième semaine, la campagne du candidat à sa propre succession. Une question nous brûle les lèvres, depuis que Sellal et les cinq autres ménestrels au service des Bouteflika sont de plus en plus chahutés et malmenés : comment un président-candidat, qui affirme avoir répondu à la demande insistante du peuple pour sa réélection, fait-il encercler ses hommes par des troupes d’élites de la police et de la gendarmerie pour les protéger contre ce même peuple ? Comment un président-candidat qui se dit populaire au point de «devoir» rempiler, bien que gravement malade, pour respecter [son] «serment pour l’Algérie», cloître-t-il ses ministres dans un mini-Etat au Club des Pins alors qu’il s’enorgueillit d’avoir rétabli la sécurité dans le pays ? Il n’y a pas de doute que la campagne électorale de Bouteflika tourne au désastre. Et plus les jours passent, plus les citoyens sont saturés par les images et les discours d’un Sellal qui s’est vu – suite à un changement in extremis du candidat du système – refaire la même tournée dans les mêmes wilayas, deux fois de suite. Depuis, le clan présidentiel bricole une communication improvisée et, donc, forcément contreproductive, appuyée sur des chaînes de télévision pâle copie de l’ENTV, jusqu’à la gestuelle des présentateurs et au décor de la météo. La réaction vive et prompte de la direction de campagne de Bouteflika, hier, suite aux événements de Béjaïa, dont on ne sait pas s’ils seront suivis d’une enquête sérieuse pour remonter jusqu’aux véritables commanditaires (voir article, par ailleurs), confirme cette tendance à l’auto-victimisation. Elle fait suite à d’autres plaintes contre les militants de candidats rivaux qui perturberaient les meetings «spontanés» des représentants du candidat «indépendant» Bouteflika. L’allusion claire à Benflis trahit une panique en haut lieu devant ce qui s’apparente à un cheminement vers une débâcle quasi certaine le 17 avril. D’ici là, les rugissements terrifiants du début de campagne seront peu à peu remplacés par les miaulements terrifiés de fin de règne.
M. A.-A.
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