Une mauvaise foi évidente
Par Kamel Moulfi – Le candidat Ali Benflis à l’élection présidentielle du 17 avril a été «épinglé» sur deux thèmes très sensibles dans l’opinion publique algérienne : les «négociations» avec le FIS et la «réouverture» de la frontière avec le Maroc. Dans les deux cas, les médias n’ont repris qu’une partie de ses propos et ont sciemment ou inconsciemment escamoté l’essentiel : les conditions qui accompagnent ces deux démarches. Commençons par le deuxième thème qui a fait l’objet d’un gros titre sur un quotidien : «Ali Benflis à Annaba : "Je rouvrirai la frontière avec le Maroc"». Il faut lire l’article pour apprendre que Benflis «pose cependant des conditions et des préalables» dont la concrétisation est, reconnaissons-le, plutôt problématique : régler les problèmes de la drogue, de la sécurité et du Sahara Occidental, n’est pas pour demain. Autant dire que personne ne rouvrira de sitôt cette frontière terrestre qui est restée fermée à tout trafic depuis 1994, après que le Maroc eut imposé le visa aux Algériens voulant se rendre dans ce pays, suite aux attentats de Marrakech que le Makhzen avait imputés à l’Algérie. Les médias marocains ne se sont pas laissé berner par la «manipulation» de l’information. Ils ont bien lu les «conditions et préalables» et compris parfaitement le message de Benflis. Quant au thème du FIS, inutile de s’y attarder, son chef, Abassi Madani, l’a dit lui-même : nous n’avons pas eu d’écho des candidats approchés (allusion à Benflis, mais aussi à Bouteflika). Comment soupçonner un candidat de vouloir réhabiliter le FIS alors qu’il n’a aucun contact avec ce parti qui a été dissous par une décision de justice et dont le dossier a été déclaré clos de longue date déjà ? Dans une campagne électorale, déformer les propos de l’adversaire est de bonne guerre, dit-on, même si cela s’accompagne d’une mauvaise foi évidente, comme on le constate en ce moment. Mais, chez nous, il arrive que des médias, censés être «objectifs», s’y mettent aussi, n’hésitant pas à bafouer déontologie et éthique et tous les fondamentaux qui font le professionnalisme dans ce métier. Il y a de quoi rester perplexe devant cette propension à l’intox. Un conseil aux hommes politiques : apprenez à peser vos mots quand vous êtes en présence de journalistes !
K. M.
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