Réponse du Civic à l’appel de la coordination des partis et personnalités politiques
Les résultats de l’élection présidentielle du 17 avril 2014 confirment, une fois de plus, la position de la grande majorité des Algériens à l’égard du pouvoir actuel et, par conséquent, à l’égard du régime politique, institutionnel et juridique qui contrôle le système, mis en place au fur et à mesure, dès la proclamation de l’indépendance. Compte tenu de cette position, le Civic d’Oran ne peut que se féliciter de l’initiative de la coordination des partis et personnalités ayant appelé au boycott de la dernière présidentielle. Il se félicite non pas parce que c’est un autre appel, lancé à la suite de tant d’autres, mais parce que cette démarche est un appel à toutes les personnalités politiques, à toutes les associations indépendantes et à tous les syndicats autonomes pour agir effectivement, en vue de construire un projet alternatif au projet du pouvoir en place, tout en transcendant les luttes des personnes pour le leadership.
Cette invitation tombe au bon moment pour les démocrates. Elle tombe au bon moment, car la population silencieuse consciente a définitivement pris ses distances par rapport à ce pouvoir. Elle tombe au bon moment, car elle nous rappelle aussi que nous ne devons jamais occulter dans notre analyse que le pouvoir, qui anime le régime actuel, possède un projet bien déterminé, bien défini. Ce projet consiste à assurer la pérennité de la nature du présent régime politique et institutionnel et juridique, en usant et abusant de manière autoritaire de la coercition et de la prébende. Le but ultime d’un tel projet est de garantir le contrôle total du système de répartition des richesses de la nation algérienne, ainsi que le bradage du sol et du sous-sol algérien en toute impunité. Or, tout le problème, jusqu’à maintenant, est que ce projet et cette finalité n’ont jamais été sérieusement concurrencés par un autre projet et une autre finalité, en dehors du projet des islamistes de la fin des années 80. Il est vrai que la chape de plomb a eu raison de toutes les bonnes volontés. Seulement, il ne faut pas perdre de vue que cette chape de plomb est l’un des moyens utilisés par les gardiens du temple pour permettre à ce temple de réaliser sa finalité suprême, en demeurant imprenable telles les forteresses du Moyen-Âge. De ce fait, construire un projet viable différent des deux autres est une nécessité vitale et impérieuse pour tous ceux qui se positionnent en tant que démocrates. Il ne suffit plus de proclamer, aujourd’hui, que la solution pour l’Algérie et les Algériens est dans une solution alternative. Il s’agit dorénavant de dire voici notre projet alternatif pour que tous les Algériens puissent non seulement mieux vivre leur pays, mais aussi mieux vivre dans leur pays. Aussi, le Civic d’Oran ne peut qu’adhérer à cette initiative, qui cherche à définir des objectifs, une stratégie et des moyens pour parvenir à édifier le projet démocratique, au-delà des luttes pour le leadership. Ces luttes qui ont été fortement préjudiciables à une telle entreprise, tout en faisant le jeu et le bonheur des animateurs du régime en place. Il est clair, cependant, que les meilleures intentions restent peu suffisantes pour mener à terme une telle initiative. La tâche est difficile. Elle est lourde voir de longue haleine dans la mesure où, pour nous, le projet démocratique n’existe pas encore. Il doit naître. Et toute la difficulté réside dans le déclenchement du processus qui lui donnera naissance. Pour le Civic, une telle naissance ne peut se faire que si ce projet est porté par une mouvance démocratique crédible politiquement. Ce projet ne peut prendre forme que s’il est véhiculé par une mouvance démocratique engagée autour d’un certain nombre de valeurs sociétales consensuelles. Car sa naissance, son existence et sa réussite dépendent, incontestablement, de l’adhésion de la majorité des Algériens silencieux, mais conscients d’une telle nécessité. Par conséquent, le premier objectif à réaliser à moyen terme est d’engager une dynamique politique pour faire émerger cette mouvance démocratique. Une dynamique qui aura pour but de faire converger les positions des uns et des autres autour d’un système de valeurs démocratiques consensuelles. Ce système de valeurs constituera la substance idéologique, qui drainera l’adhésion à ce projet démocratique de la majorité du peuple algérien. Une substance qui sera capable de lui faire acquérir une véritable légitimité populaire. Ce système de valeurs consensuelles doit être conçu pour être le soubassement doctrinal du projet démocratique. Il doit être conçu pour être le fondement philosophique, sur lequel doit se baser le régime politique et juridique démocratique alternatif au régime actuel. Il doit être conçu pour être la source de toutes les politiques : économique, sociale, éducative, culturelle, sécuritaire et de défense, qui seront proposées aux Algériens, en tant que politiques alternatives à celles du pouvoir en place. Il doit être conçu, enfin, pour être le cadre à travers lequel la forme organisationnelle de cette mouvance démocratique sera définie et au sein duquel ses actions seront déterminées. D’où, pour le Civic d’Oran, il est capital d’engager rapidement un débat sur les valeurs démocratiques qui sied à la société algérienne, compte tenu de tous les éléments qui composent sa sociologie. Ce débat ne doit surtout pas aboutir à l’exacerbation des confusions et à l’entretien des amalgames. Il doit servir essentiellement à clarifier les notions, les enjeux et les positions. Un tel effort intellectuel de conceptualisation est indispensable, faute de quoi la mouvance démocratique ne sera, pour le peuple et pour le pouvoir, qu’un regroupement d’agitateurs sans portée et sans envergure. Cette clarification doit permettre de parvenir, à court terme, à l’élaboration d’une plate-forme politique consensuelle, qui exposera les principes fondateurs de la mouvance démocratique, autour desquels se regrouperont les forces démocratiques désireuses d’en faire partie. L’adhésion ou non à cette plate-forme nous permettra de compter nos forces et d’évaluer nos moyens, pour savoir si notre projet pourra être, effectivement, le projet alternatif à celui des animateurs du régime actuel.
Chadly Benguesmia, Civic d’Oran