Joëlle Milquet : «Il y a 800 djihadistes marocains en Syrie»
Ce chiffre a été donné par la ministre de l’Intérieur belge, Joëlle Milquet, lors d’une réunion internationale sur les mouvements djihadistes qui se tient à Val Duchesse, à Bruxelles. Une réunion ministérielle thématique à laquelle prennent part plusieurs pays européens, la Belgique, la France, l’Allemagne, l’Espagne, la Suède, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, ainsi que les Etats-Unis. La réunion a été élargie, cette fois-ci, à des pays d'origine des djihadistes ou de leurs familles, à savoir la Jordanie, le Maroc, la Tunisie et la Turquie. Pour freiner le flux de terroristes en provenance de ces pays, l’Union européenne ont appelé à la nécessité «d'autoriser la consultation des données personnelles des passagers enregistrées par les compagnies aériennes». La ministre de l’Intérieur belge a également fait état d’une diminution du nombre d’islamistes radicaux se rendant en Syrie, en raison, a-t-il estimé, de la «dégradation de la situation» dans ce pays, suite aux revers essuyés par les groupes islamistes armés sur place, face à l’armée syrienne. Pour Joëlle Milquet, en effet, «l'idéalisme des débuts a fait place à la fragmentation des mouvements d'opposition». Hormis les huit cents Marocains présents en Syrie aux côtés des insurgés, 160 Belges s’y sont également rendus, toujours selon la ministre de l’Intérieur belge. Il va de soi que parmi ces 160, une grande majorité ne peut être que d’origine marocaine, la communauté marocaine étant la plus nombreuse en Belgique. Le Maroc a de tout temps tenté de cacher les proportions alarmantes que prend le phénomène de l’extrémisme religieux dans ce pays. Certes, la monarchie alaouite n’a pas connu une grande vague de terrorisme sur son territoire, hormis deux ou trois attentats meurtriers, comme ceux de Casablanca en 1994 et de Marrakech en 2011, mais la présence de plus en plus importante de terroristes marocains dans les rangs des groupes islamistes armés qui activent dans le Sahel et, depuis peu, en Syrie, fait craindre une recrudescence du terrorisme au Maroc. Une telle éventualité serait fatale pour le pays, embourbé dans une grave crise économique et financière et incapable de faire face à un déferlement de la violence islamiste. Au moment où l’Algérie affrontait le terrorisme dans les années 1990, le Maroc a servi de base arrière avec la bénédiction du Makhzen, qui était allé jusqu’à accueillir le fondateur du GIA, Abdelhak Layada, sur son territoire, avant de le restituer sous la menace aux autorités algériennes. Par ailleurs, l’absence de coopération de la part de Rabat dans la lutte contre le terrorisme transfrontalier et ses efforts pour asseoir un leadership sans avoir ni les moyens ni l’expérience nécessaires pour ce faire risque de se retourner contre le Maroc au cas où une action commune sérieuse et coordonnée contre les groupes armés n’est pas envisagée. Le but d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et du reste des organisations terroristes qui foisonnent dans les pays du Sahel est d’élargir leur action armée à tous les pays du Maghreb. Les calculs égocentriques et les messes basses du pouvoir marocain encouragent une telle propagation du terrorisme plus qu’il ne l’endigue. Le nombre élevé de djihadistes marocains présents en Syrie et l’absence de l’Algérie à la réunion de Bruxelles sont une preuve que l’Algérie n’est plus un pays pourvoyeur de terroristes et que le Maroc est en train de l’être.
Karim Bouali