Les malheurs d’une invention algérienne
Kamel Bouchama, écrivain bien connu, ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, ancien ambassadeur, sait bien de quoi il parle quand il considère le jeu de lettres et de stratégie «Le Phenix» comme «n’ayant rien d’une création excentrique, c’est une création excitante et spirituelle qui fera certainement date dans l’histoire des jeux de société. C’est une impressionnante découverte qui s’inscrit dans le cadre des jeux de société qui créent de l’ambiance et réunissent les jeunes et les moins jeunes autour du bon raisonnement, de la meilleure attention et du loyal défi, en somme de tout ce qui accroît l’intelligence et concède un plus à la culture» (Dans la préface du livre : «J’ai créé le jeu de lettres et de stratégie le plus intéressant au monde»). Il ajoute : «L’auteur du "Phenix" n’a pas été soutenu par les responsables de son pays. C’est triste, mais c’est pernicieux, pour ne pas dire malveillant, quand les nôtres perpétuent leur conduite insensée à l’encontre des valeurs de leur pays.»
La pensée de M. Bouchama est corroborée par la reconnaissance de l’innovation majeure que «Le Phenix» a introduite dans les jeux de société en général et dans le domaine des jeux de lettres en particulier existant dans le monde, lui valant commentaires de presse, séquences télévisées et médailles des plus prestigieux salons des inventions. Il s’agit de savoir comment et pourquoi un tel jeu, dont il a été dit ailleurs qu’il «honore l’Algérie», n’a pas bénéficié de l’attention qu’il mérite de la part des autorités du pays qui l’a vu naître, à commencer par l’éducation, la culture, la jeunesse et les sports, le ministère de l’Intérieur et aussi le ministère de l’Industrie, des PME et de la Promotion des investissements. La réponse à cette question est pleinement signifiée dans le jugement donné par M. Bouchama : «Abdallah Chabani a eu des déboires pour la promotion de son produit dans son propre pays… et là, force est de constater que l’inventeur est tombé nez à nez, pour son malheur, avec des "impressionnistes" qui se bornent à fixer la rencontre de l’oeuvre avec leur subjectivité.»
L’impression qui prévaut dès l’abord est bien celle entretenue par des responsables, et même par le public, qui croient fermement que «Le Phenix» n’est qu’une simple réplique du plus connu des jeux de lettres dans le monde, le Scrabble, alors qu’ils se fourvoient dans une confusion monumentale telle qu’elle aurait été vite perçue avant eux par des spécialistes étrangers pour le remarquer, alors que le jeu a bien été considéré par ces derniers comme une authentique révolution dans les jeux de société, et ce sont les éloges saluant le jeu qui l’expliquent bien. Une précision de taille s’impose : si «Le Phenix» adopte la même démarche que tous les autres jeux de lettres dans le monde utilisant le principe des mots croisés, il diffère de tous avec sa formule innovante de la «Bataille de mots» qu’il est seul d’avoir initiée dans le domaine et qui a généré de nouvelles dispositions de l’esprit, sollicitant intensément les facultés intellectuelles (imagination, mémoire et jugement) pour les entretenir, les éduquer et les développer, impliquant les joueurs dans l’esprit du jeu d’échec avec des lettres, même s’ils n’y ont jamais joué, et en plus dans la stratégie du jeu de Go chinois. Tout ceci, n’existe nulle part dans les jeux de lettres. Or, c’est bien sur cette «Bataille de mots» que s’est focalisée l’attention des ludologues, des éducateurs, des psychologues, de la presse écrite, des chaînes de télévision et des adeptes de jeux de lettres dans les neuf salons internationaux spécialisés où il a été engagé avec une floraison de commentaires projetés sur l’image de marque de l’Algérie. En analysant l’immense impact que le jeu de lettres le plus connu a induit sur le plan éducatif, culturel et des loisirs à l’échelle mondiale, traduit dans différentes langues, et avec la certitude absolue que le jeu de lettres et de stratégie «Le Phenix» se différencie du Scrabble par un apport conséquent sur le plan didactique qui lui est reconnu, rien n’empêche de croire qu’il a déjà engagé le challenge avec le jeu le plus vendu dans le monde, toutes catégories confondues. Son heure de gloire est tributaire d’une médiatisation appropriée pour que tous les adeptes de jeux de société le découvrent avec étonnement, surprise et intérêt. Bien que légalement protégé à l’Office national de la propriété industrielle (ONPI) de Paris, «Le Phenix» a été contrefait en France avec la preuve matérielle de la contrefaçon établie par l’expert commis par le tribunal de grande instance de Paris, valant au plagiaire une inculpation par le juge d’instruction au motif de contrefaçon d’une œuvre de l’esprit protégée, mais les jugements rendus en première instance, en appel et à la cassation, m’ont débouté de mes droits reconnus dans les textes de loi sur base d’une discrimination criante et perceptible à vue. Les autorités algériennes saisies de l’affaire n’ont pas daigné donner de suite alors que les moyens de rétorsion existent au plan légal et matériel. C’est, dira M. Bouchama, «…du fait qu’il n’a pas été considéré par les siens, une discrimination patentée doublée d’une injustice criante lors d’un procès tellement clair, mais tronqué pour des raisons évidentes, a fait son petit bonhomme de chemin en allant débouter le plaignant qui comprenait à cet instant précis qu’il était un "sous-homme dans la culture raciste". Il savait également, parce qu’aucune réaction positive de la part des siens n’a été projetée, que son affaire ne pouvait aboutir de l’autre côté de la Méditerranée où les responsables défendent crânement les leurs». Où en est exactement la situation du «Phenix» par rapport à la société algérienne ?
Lors d’un salon consacré aux loisirs éducatifs, culturels et scientifiques organisé à Tipasa par un organisme étranger, et à la question de savoir pourquoi «Le Phenix» a eu droit à des séquences télévisées à TF1, Arte, Canal J, RTL et France 2 avec Patrick Sebastien et que l’ENTV fait la sourde oreille aux sollicitations de son inventeur, un très haut responsable eut cette réponse : «Les émissions coûtent cher !» Mais à France 2 où j’avais été invité à prendre part à l’émission de Patrick Sebastien consacrée à des inventions, pris en charge à partir d’Alger, tous frais payés, au lendemain de la remise de la médaille de bronze du Concours Lépine, la chose était perçue autrement : on considérait «Le Phenix»comme un vecteur de la francophonie en Algérie… tout bonnement. Tandis que la version arabe du jeu, «El-Anka», au lendemain de sa concrétisation, remise au directeur du Conseil supérieur de la langue arabe, l’actuel président de l’Assemblée nationale, n’a même pas reçu, en retour, ni compliments, ni encouragement, ni même un simple remerciement alors que le jeu est tout désigné pour aider à promouvoir la langue. De même, quand l’ancien directeur général de l’Unesco qui est le temple de la culture, de l’éducation et des sciences à l’échelle mondiale, M. Federico Mayor, avait reçu «Le Phenix» en le jugeant juste un mois après comme un nouveau support pour le développement des facultés intellectuelles, ici, des trois ministres de la Culture qui se sont succédé et l’ayant reçu à leur tour avec son press-book, aucun n’a porté sur lui le moindre jugement et encore moins le moindre encouragement. Et que dire de la direction du Centre culturel algérien à Paris qui n’a même pas pris l’initiative de faire connaître le jeu aux Algériens qui fréquentent les lieux ? Mais les déceptions cumulées ne s’arrêtent pas là. Si elles n’avaient que le mérite de perturber mon psychique seulement, c’est qu’elles privent essentiellement la société algérienne d’atouts reconnus pour contribuer au rehaussement du niveau éducatif et culturel et pour combler le temps des loisirs. L’exemple est de rapporter ici l’incident tout récent m’ayant confronté au secrétaire général du ministère de l’Education nationale suite à l’engagement du «Phenix» au World Innovation Summit for Education (WISE) organisé par les autorités du Qatar et rassemblant des spécialistes de l’éducation pour débattre des nouveautés dans le domaine à l’échelle internationale, sous le patronage de l’Unesco, entre autres. «Le Phenix» a été retenu comme sujet intéressant me permettant d’être membre de la communauté, appelé à venir expliquer en quoi il consiste, aidé par ma possibilité de le dire en anglais. C’était une belle occasion de faire connaître «Le Phenix» comme nouveau moyen de promotion éducative adaptable à différentes langues dans le monde et une opportunité d’associer des partenaires dans son rayonnement. Mais c’était sans compter avec les frais engagés pour marquer ma présence à ce forum, frais s’élevant à environ 320 000 DA incluant les frais de participation et le billet aller-retour Alger-Doha. Comme mes moyens sont terriblement réduits avec les énormes dépenses engagées entièrement de ma poche dans neuf salons internationaux pour faire connaître le jeu, et par ailleurs sans ressources avec l’obligation de cesser mes activités commerciales dans un contentieux qui traîne en justice depuis plus de 6 ans, il ne me restait plus que de solliciter le concours des ministères de l’Education et de la Culture pour une prise en charge de l’un d’entre eux. Parallèlement à cette démarche, une requête fut soumise au Premier ministre souhaitant son appui en le priant, par ailleurs, de bien vouloir diligenter une enquête pour connaître les raisons de cette longue période de temps me mettant dans l’obligation de cesser mes activités professionnelles en relation avec les lenteurs de la justice. C’est au ministère de l’Education que je m’étais rendu quelque temps après pour connaître la suite donnée à ma requête, et c’est après plus d’une heure de temps passée dans la salle d’attente qu’un planton était venu me rapporter ce que le secrétaire général lui a dit de me dire : «N’étant pas membre du personnel de l’Education, le ministère ne pouvait me prendre en charge.» J’ai alors demandé que cette notification me soit signifiée par écrit, ce à quoi le planton s’engagea de transmettre, mais tarda à réapparaître pour ensuite m’approcher du bureau du secrétaire général en insistant de le voir, mais le réceptionniste demanda que je retourne dans la salle d’attente. Devant mon refus et mes éclats de voix, le secrétaire général apparut alors me faisant savoir «qu’il n’y avait aucune obligation de me signifier le rejet de ma requête par écrit». J’ai rétorqué que je n’allais pas à Doha en touriste, que la somme allouée en rapport avec l’impact recherché est dérisoire, que la démarche intéresse en premier lieu son propre ministère en charge de l’éducation et qu’il m’en a coûté assez de mon propre argent pour la récolte du prestige en faveur de l’Algérie à travers mon jeu. Mes gesticulations et mes éclats de voix firent sortir des employés de leurs bureaux. Du coup, comme atteint dans son image de chef par un trublion, et sur ses ordres, je fus aussitôt encadré par des agents de la sécurité et conduit à la sortie comme un vulgaire imposteur. Je pense quand même que les 10 exemplaires du jeu dans leurs versions arabe et française remis au ministère à titre gracieux avant l’incident trouveront quelqu’un qui saura apprécier à sa juste valeur leur fondement didactique dans l’enrichissement du vocabulaire des deux langues et l’éveil des facultés intellectuelles chez les jeunes. Connaîtrait-on la raison poussant madame la ministre de la Culture à garder un mutisme total, malgré plusieurs relances, pour donner suite à la requête formulée pour son concours de prise en charge du «Phenix» au dernier WISE ? Est-ce par mépris ou par manque de civilité quand on sait que M. Jacques Chirac, du temps où il était président de la République française, lui, avait bien répondu à ma lettre pour me signifier que sa haute fonction lui interdit d’interférer dans les décisions de justice alors que je me plaignais à lui du déni de justice dont je suis encore victime dans la contrefaçon de mon jeu. Quelle différence y a-t-il entre une plainte adressée au président de la République française qui lui donne une suite satisfaisante et le mutisme d’une ministre de la Culture qui ne répond même pas à la demande d’aider une invention algérienne hautement appréciée à l’étranger ? Il faut croire qu’en Algérie les autorités disposent d’un droit régalien pour ne pas répondre aux doléances des citoyens, et les boîtes de leur mail n’existent que pour la figuration dans ce cas. Madame la ministre croit peut être avoir assez fait en incluant «Le Phenix-El-Anka» dans le cadre d’«Alger, capitale de la culture arabe», alors qu’avec les moyens dont elle dispose, il est évident que le jeu a été négligé au plan proprement culturel par rapport à la culture des caisses de résonance diffusant à longueur de journée des rengaines populaires alimentées par les deniers publics, qui financent par ailleurs des navets au plan cinématographique. C’est au tour du ministère de la Jeunesse et des Sports avec son appendice… et des loisirs qui aurait à répondre de sa défaillance face au pouvoir rassembleur du «Phenix» qui lui a été suggéré comme moteur de loisirs, entre autres. En fait de «loisirs», excepté la footballite financée à coup de milliards de dinars, il faut croire qu’au vu de notre jeunesse privée d’autres occupations autres que «sportives», le ministère ne propose rien d’autre, alors qu’il n’y a pas lieu d’être expert extra-terrestre pour provoquer le rassemblement des jeunes d’une ville pour des tournois interquartiers avec deux finalistes, en arabe et en français, lesquels rencontreront les finalistes d’autres villes pour un tournoi annuel national groupant tous les finalistes des 48 wilayas autour du «Phenix-El-Anka» avec la certitude de leur trouver des sponsors pour les récompenser dans leurs efforts de saines activités culturelles, éducatives et de loisir. On préfère dévoyer ces saines occupations au profit des sports gangrénés par l’argent où sont hissées sur le podium des vedettes éphémères gavées de millions de dinars pour entretenir cette footballite aux relents de politique de bas étage. Et c’est justement avec des amis que nous voulions suppléer à cette défection en allant déposer au ministère de l’Intérieur, en mai 1998, (déjà !) notre dossier, complet conformément à la loi, pour obtenir l’agrément de notre Fédération nationale du jeu de lettres «Le Phenix», association culturelle à but non lucratif en vue d’organiser des tournois interquartiers d’une ville, intervilles et national annuel interwilayas. Après vérification des pièces légales exigées, le préposé au service refusa de délivrer un accusé-réception du dossier, et comme nous lui faisions remarquer que sa décision n’avait rien de légal, il nous offrit le choix de déposer le dossier et partir sans accusé-réception en attendant une décision, ou reprendre notre dossier comme si de rien n’était. Finalement, le dossier a été laissé tel quel au ministère, et jusqu’à l’heure aucune suite ne nous a été notifiée. Bien que cela puisse se définir comme un lèse-culture, il y a lieu de ne pas s’offusquer outre mesure, parce que la confluence de toutes ces obstructions ne découle pas du simple hasard. Même le secteur dit «privé» se mêle à la curée pour marquer son ostracisme au jeu lui préférant «l’autre jeu de lettres qui marche bien», sans chercher à promouvoir un meilleur sujet algérien, à l’exemple des grandes surfaces, ou des libraires qui veulent le beurre et l’argent du beurre à la fois en imposant «le dépôt-vente». Voici une information pouvant intéresser le ministère de l’Industrie, des PME et de la Promotion des investissements à la recherche de créneaux pouvant suppléer à la matrice aléatoire des exportations d’hydrocarbures : créé en 1945 par Alphred Mosher Butts, le fameux Scrabble, est aujourd’hui le jeu le plus vendu dans le monde, toutes catégories confondues, traduit de l’anglais dans différentes langues à travers le monde et générant des centaines de millions de dollars de chiffres d’affaires tous les ans. Ici, je renouvelle l’engagement solennel pris lors du premier salon international que j’ai fait en 1993 à Villepinte, à Paris, devant les visiteurs à mon stand de donner 10 000 francs à quiconque, de bonne foi, de nommer un jeu de lettres qui soit meilleur que «Le Phenix» et qui existerait quelque part dans le monde. J’ai la ferme certitude de n’avoir pas à débourser cet argent avec l’assentiment de quelqu’un, bien versé dans le domaine, qui a écrit ceci dans le livre d’or du «Phenix» : «Il est exclu que quelqu’un perçoive ces 10 000 francs» ou de leur équivalence en euros aujourd’hui, en maintenant toujours le même engagement, parce que sûr de l’appui des ludologues. En 1997, alors que je présentais «Le Phenix» au Festival international des Jeux de Cannes, où j’avais appris incidemment que l’As d’Or que je convoitais avait été attribué frauduleusement quatre années avant à celui qui a plagié mon jeu, et après avoir expliqué «Le Phenix» à une vieille dame à qui je demandais si elle voulait porter une appréciation dans son livre d’or, elle répondit que cela pouvait ne pas me plaire. J’insistais dans mon propre intérêt qu’elle le fasse. Finalement, elle se décida en écrivant qu’elle préférait le Scrabble. Je lui fis savoir que je respecte son appréciation, mais tenais à en connaître la raison de son choix. Elle répondit que mon jeu était trop agressif. Sur quoi, j’ai éclaté de rire en lui faisant savoir qu’il ne s’agit pas d’une «agression physique», mais qu’elle devait se mesurer à un partenaire qui la harcèle avec ses facultés mentales et qu’elle devait réagir avec autant de pugnacité de son intellect pour se faire valoir et dominer autant que faire se peut. Elle prit congé sans se convaincre de mon raisonnement, me laissant croire que le soft est le fort de ceux qui ne veulent pas se fouler la rate. Au fait, pourquoi le nom Phénix donné au jeu ? Dans le feu de la bataille, des mots sont détruits intégralement alors que d’autres ne le sont que partiellement. Ces derniers, souvent dénaturés, perdent de leur signification, mais conservent leurs lettres résiduelles desquelles ils peuvent ressusciter soit pour reformer le mot original, soit pour donner naissance à un mot différent rappelant les cendres desquelles renaît l’oiseau mythique après avoir été consumé par le soleil… d’où le nom que j’ai retenu pour le jeu. M. Greg Stanton, maire de la ville de Phoenix aux Etats-Unis, après avoir pris connaissance de la nouveauté et de la pratique du jeu, s’est empressé de me féliciter et de m’encourager en espérant qu’un jour sa version anglaise arrive dans la capitale de l’Arizona.
Abdallah Chabani
www.lephenix.dz