Des milliards… et après ?
Par Meriem Sassi – Le secteur de l’agriculture sera doté d’une enveloppe de 300 milliards de dinars pour les cinq prochaines années, selon le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Abdelwahab Nouri. Le budget qui sera alloué au secteur lors du prochain quinquennat (2015-2019) devrait être ainsi augmenté de 100 milliards de dinars par rapport au précédent quinquennat (2010- 2014). Au-delà des chiffres qu’il sème à la volée face aux journalistes, le ministre ne dit cependant pas ce qu’il advient de tous ces budgets et quelles sont les réelles avancées de l’agriculture algérienne suite à tous les programmes mis en œuvre depuis une vingtaine d’années. Le secteur peine en réalité à dépasser les 11% de contribution au PIB national malgré les potentialités et les sommes colossales dégagées chaque année par le gouvernement. L’objectif d’une autosuffisance alimentaire, notamment pour les céréales, est loin d’être à la portée du pays qui continue de grever son budget annuel en mobilisant une part importante des recettes tirées des hydrocarbures pour l’importation et le stockage préventif, en cette conjoncture mondiale trouble, de quantités importantes de blé. Au-delà de la politique des chiffres, le gouvernement devrait tenter de tirer tous les enseignements des bilans précédents et définir, une bonne fois pour toutes, les obstacles qui freinent une réelle relance de ce secteur clé. Il est en effet un constat à faire : l’Algérie dispose d’un potentiel important dans le domaine de l’agriculture, mais il reste ignoré et largement sous-exploité. La politique de l’allocation de budgets toujours plus imposants, sans bilans préalables, encourageant la corruption et les détournements en tous genres, comme ce fut le cas ces dernières années, n’est certainement pas la panacée. Le règlement des problèmes de gestion, la lutte contre la gabegie et la corruption, l’orientation des agriculteurs, la mobilisation de ressources en eau et de moyens d’irrigation, le développement de la recherche scientifique et l’encouragement de milliers d’agronomes formés chaque année,et livrés au chômage ensuite, sont les clés de la relance selon les experts. L’orientation des jeunes vers le secteur de l’agriculture est par ailleurs primordiale à travers, notamment, une formation adaptée et la diversification des branches liées au développement des activités agraires. Actuellement, ces branches sont malheureusement le parent pauvre de la formation professionnelle y compris dans les régions à vocation agricole. Par ailleurs, le dispositif de l’Ansej mis en œuvre pour résorber le chômage des jeunes ne compte que rarement des initiatives tournées vers l’agriculture, au profit de fast-food et de kiosques multiservices. Face à ce constat affligeant, il faut peut-être rappeler au ministre que la volonté politique n’est pas qu’une question de milliards.
M. S.
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