A sens unique
Par Kamel Moulfi – «Ascométal reste sous pavillon français», ce titre, sur l’air d’un «cocorico !» mérité par Arnaud Montebourg, est arboré avec fierté, on le comprend, par certains journaux de l’Hexagone. Pour la façade, ce n’est pas le gouvernement Valls mais le tribunal de commerce de Nanterre qui a pris la décision d’empêcher l’industriel algérien Issad Rebrab de s’emparer de ce groupe sidérurgique (voir article sur Algeriepatriotique), mais la justice française a démontré que son indépendance n’exclut pas le patriotisme. Issad Rebrab a-t-il été naïf ou ignore-t-il ce que sont les aciers spéciaux ? Sans doute dopé, médiatiquement, par la reprise d’une manufacture qui fabrique des réfrigérateurs et autres appareils électroménagers, il a pensé pouvoir s’attaquer à ce qui est stratégique pour la France. Il faut lire les propos qu’il a livrés à un site d’informations économiques français (Challenges, pour ne pas le nommer), pour mesurer à quel point Issad Rebrab a cru qu’en France il aurait la liberté d’entreprendre que l’Algérie lui a offerte pour bâtir sa prospérité. Son rêve, en reprenant Ascométal : en un an faire passer la production de 135 000 tonnes à un million de tonnes d’aciers spéciaux et courants ; en exporter 90% vers l’Afrique ; puis porter la production à 2 millions de tonnes en trois ans ; autour de ce site sidérurgique (Fos, au sud de la France), créer un port privé et un complexe industriel avec une usine de trituration de graines oléagineuses pour faire de l’huile végétale et des tourteaux de soja et un site de production d’éthanol. Rien que ça, comme dot ! Faut-il reprocher au socialiste Montebourg de défendre l’intérêt national de son pays et le bien-être de son peuple ? Sûrement pas. Sur cet aspect, il se distingue de son président Hollande et du ministre des Affaires étrangères, Fabius, foncièrement «transatlantiques», qui, eux, attendent le «la» donné par les Américains pour connaître le ton que doit prendre la politique extérieure de la France. Mais quelle leçon en tirer, pour nous ? Les Français nous chantent les vertus de la coopération économique, nous envoient ministre après ministre… et quand un Algérien veut racheter des entreprises moribondes dans l'Hexagone, M. Montebourg (qui est venu en Algérie) oppose le veto du gouvernement français via une décision de justice pour camoufler l'interventionnisme de Matignon. C'est donc une coopération à sens unique que nous impose la France avec la bénédiction de ce régime qui s'avère de plus en plus inféodé à Paris.
K. M.
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