Pourquoi l’Algérie doit s’inquiéter de la facture alimentaire
L’Algérie, dont la facture d’importation des produits alimentaires a connu durant le premier trimestre de l’année en cours une hausse de 13,6% par rapport à la même période de l’année précédente, doit vraiment s’en inquiéter avant qu’il ne soit trop tard. Notre pays, qui importe annuellement 30 à 50% de ses besoins alimentaires et qui, pour cela, avait consacré l’année dernière quelque 9,5 milliards de dollars, verra sans aucun doute la facture augmenter et les prévisions des cours internationaux ne sont visiblement pas de nature à rassurer, et la facture risque d’être davantage extrêmement salée. Et pour cause. Selon la dernière édition du rapport trimestriel Food Price Watch publiée par la Banque mondiale, les cours des produits alimentaires sur les marchés internationaux ont augmenté de 4 % entre janvier et avril 2014, attisés essentiellement par des inquiétudes grandissantes face aux conditions météorologiques et à la hausse de la demande d’importations. Le plus inquiétant dans cette tendance, c’est que cette envolée des prix interrompt une tendance prolongée à la baisse amorcée depuis août 2012. Les prix repartent donc à la hausse. Et si la facture d’importations des produits alimentaires de l’Algérie avoisinait jusque-là 10 milliards de dollars annuellement lorsque les cours internationaux étaient plus ou moins stables, qu’en sera-t-il cette année que les prix s’envolent ? Et ces augmentations des prix concernent, en sus, des produits que l’Algérie importe en grosses quantités, comme les céréales et la poudre de lait. D’ailleurs, selon le rapport de la Banque mondiale, les plus fortes hausses de prix enregistrées durant les trois premiers mois de l’année en cours sont celles du blé (+18%) et du maïs (+12%). Deux produits que notre pays importe abondamment, le premier pour l’alimentation humaine et le second pour le bétail. D’autres produits alimentaires continuent de tirer vers le haut la facture alimentaire algérienne qui a atteint 2,74 milliards de dollars durant le premier trimestre 2014 contre 2,44 milliards de dollars durant la même période de 2013. Il s’agit, en effet, de la viande (55,15%) et du lait et produits laitiers (38%). Mais par rapport à cela, il n’y a pas que l’Algérie qui doit s’en inquiéter. Tous les pays qui continuent, comme le nôtre, à s’approvisionner de l’étranger pour couvrir leurs besoins alimentaires sont mis en garde. «La météo défavorable, les incertitudes politiques et les fluctuations monétaires ont un impact, comme en témoigne la hausse des prix sur les marchés internationaux enregistrée au trimestre dernier», explique Ana Revenga, vice-présidente par intérim du Groupe de la Banque mondiale en charge du Réseau pour la lutte contre la pauvreté et la gestion économique. Cette institution internationale craint, en effet, le retour des émeutes de la faim, telles que celles que le monde a connues en 2008, provoquées par une hausse inégalée des cours internationaux de l’alimentation. La Banque mondiale lance d’ailleurs un avertissement. «Au cours des prochains moins, nous devrons surveiller les cours de près pour s’assurer que toute nouvelle augmentation n’exerce pas de pression supplémentaire sur les habitants les moins favorisés de la planète», indique, à ce sujet, Ana Revenga. Ce nouveau numéro du Food Price Watch s’intéresse au rôle des prix et des pénuries alimentaires dans les émeutes de la faim. La Banque mondiale y plaide pour un suivi régulier des cours, essentiel, explique-t-elle, «pour la sécurité alimentaire et le bien-être des populations, mais aussi pour la stabilité politique et l’atténuation des risques sur le plan de la sécurité».
A. Sadek