Un prédicateur salafo-sioniste libanais appelle à «combattre les ibadites avant les juifs»
Le prédicateur wahhabite libanais Abderrahmane Dimachqiya, connu dans les réseaux sociaux pour ses fatwas fantaisistes et extrémistes, attise le feu de la discorde en appelant à combattre les ibadites. Dans un tweet rédigé en arabe en forme de fatwa, il écrit : «Si les juifs sont la fitna sur Terre, les ibadites sont la fitna dans la religion. Par conséquent, combattre ceux qui sèment la fina dans la religion doit primer sur le devoir de combattre ceux qui sèment la fitna sur Terre.» Ce fanatique doublé d'antisémite vise-t-il spécialement les ibadites algériens (les Mozabites), qui traversent depuis quelques mois l’une des crises les plus dangereuses de leur histoire ? Tout porte à le croire, puisque des attaques récurrentes de même nature sont formulées, consciemment ou inconsciemment, contre les ibadites de la vallée du M’zab, généralement par des salafistes exploitant les litiges traditionnels qui opposent les membres de cette communauté à leurs concitoyens sunnites. Mais ce qui étonne dans cette pseudo-fatwa, c’est ce zèle et cette haine inexpliqués, qui poussent un prédicateur, en pleine agression israélienne contre Ghaza, à considérer les ibadites comme étant «pires que les juifs» et accorder la primeur au devoir de combattre les premiers. Il va sans dire que ce prédicateur extrémiste ne s’appuie sur aucune référence théologique, ni sur aucun avis consensuel des oulémas pour authentifier son jugement. Il ne fait que reproduire un schème largement répandu dans les milieux fondamentalistes sunnites, présentant les ibadites, avec les chiites, comme des kharidjites, littéralement des déviants du dogme dominant. Dans l’imaginaire des musulmans, les kharidjites représentent un courant fondamentalement opposé aux légataires autoproclamés du califat (Mouawiya et fils), mais qui a su garder ses distances vis-vis de l’imam Ali et ses partisans dans la «grande discorde» durant la deuxième moitié du VIIe siècle. Les ibadites se sont distingués parmi les premiers dissidents du pouvoir islamique par leur attitude neutraliste et foncièrement pacifiste. Aujourd’hui, ils se répartissent à travers plusieurs pays musulmans et vivent en communauté : en Algérie (vallée du Mzab), en Tunisie (Djerba), en Libye (Djebel Nefoussa), au sultanat d’Oman (rite dominant) et, enfin, en Tanzanie (Zanzibar). Etudiant à Beyrouth, Abderrahmane Dimachqiya a été expulsé en 1972 de l’université d’Al-Azhar libanais pour une histoire de mœurs, comme l’atteste un document officiel de cette institution. Recruté ensuite par les Saoudiens, il poursuivra sa formation en Arabie Saoudite, où il a longtemps enseigné à Riyad, avant de s’installer définitivement en Grande-Bretagne où il est imam d’une mosquée de Plymouth, une ville située dans le sud-ouest de l'Angleterre. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages dédiés au wahhabisme et dont une bonne partie est consacrée au dénigrement du chiisme et de tous les dogmes islamiques qui s’y rapportent.
R. Mahmoudi