Arrêtez la gabegie !
Par Kamel Moulfi – Il a fallu un séisme «modéré», selon l’appréciation des spécialistes, pour mettre à nu, de nouveau, les conditions inhumaines et dangereuses d’habitation dans plusieurs quartiers d’Alger. Plus de dix ans après le tremblement de terre meurtrier qui a frappé Boumerdès en mai 2003, des maisons marquées au «rouge» à l’époque par les services habilités à classer les risques, des maisons destinées donc à la démolition avec relogement de leurs occupants, abritent encore des familles entières. Les promesses faites par les responsables officiels n’ont pas été tenues. Entre-temps, la crise du logement s’est aggravée, contrairement à ce que veulent laisser croire les discours. Des gens paisibles sont obligés, devant la crainte d’un effondrement de leur bâtisse et la négligence des responsables locaux, de recourir à l’action de rue pour faire entendre leurs plaintes, convaincus que sans la violence, personne ne les écoutera et ils n’auront jamais satisfaction. Pourtant, ce n’est pas l’argent qui manque pour résoudre ces problèmes et bien d’autres. Mais voilà, les milliards de dollars mis dans toutes sortes de projets ont eu le résultat que tout le monde connaît : la crise de logement non réglée et, partout, des retards dans les réalisations et quand elles sont livrées, les malfaçons apparaissent très vite et les cités-dortoirs se transforment vite en dépotoirs à ciel ouvert. Il n’y a pas de projets véritablement créateurs d’emplois et de revenus, grâce aux richesses qu’ils pourraient générer ; au contraire, en la matière, c’est l’encouragement de la paresse et du gain facile à travers l'Ansej, auquel s’ajoute le laxisme qui favorise la domination écrasante de l'économie parallèle, très prospère grâce aux pratiques illégales. Le recours inéluctable à l'expertise étrangère, faute de formation et donc de compétences locales, fait ressortir toute l’inconsistance des chiffres trompeurs alignés à chaque rentrée scolaire et universitaire. Et qu’est-ce qu’on apprend ? Que ça continue : des milliards de dollars vont encore être jetés par les fenêtres. A la routine «institutionnelle» qui pousse à reconduire les mauvaises formules qui ont fait des dégâts inestimables est accolée l’improvisation qui achève ce qui reste. Aucun contre-pouvoir, à quelque niveau que ce soit, n’existe pour aider à rectifier les erreurs ; les partis politiques sont muselés et le mouvement associatif domestiqué. Il n’y a personne pour attirer l’attention sur les incohérences criantes entre le discours officiel, plein de «bonnes résolutions», et ce qui se fait sur le terrain. Conséquence : la gabegie continue. Il faut l’arrêter.
K. M.
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