Manque de discernement
Par Kamel Moulfi – Les Algérois qui passaient par le ravin de la Femme sauvage, hier, ont été surpris de voir leur route coupée par des habitants de la cité populaire de Diar El-Chems qui exigent un logement décent et sûr. Ce n’est pas tant la revendication, le relogement, ni la forme de la protestation – barrer une voie de grande circulation à l’aide de grosses pierres, de ferrailles et de branchages – qui étonnent, c’est même devenu un fait quotidien, mais que les habitants de cette cité que tout le monde croyait relogés en soient à l’origine a de quoi laisser pensifs sur l’efficacité des services de l’Etat. Les slogans écrits par les manifestants sur leurs banderoles commençaient par «Barakat» et on devine la suite : «El-hogra», «La misère»… La tournée dans quelques quartiers de la capitale du ministre de l’Intérieur et du wali, après le séisme, a donné l’impression que les décisions étaient prises au pied levé, sur-le-champ. Les bénéficiaires de ce coup de chance dû à ce qui s’apparente à de l’improvisation méritent sans doute d’être relogés. Mais l’absence de transparence d’une telle démarche fait planer des doutes sur les véritables motivations de l’opération. La secousse du 1er août a rappelé que le risque sismique est là et que la terre peut trembler à n’importe quel moment sur de larges franges du nord de l’Algérie. La priorité doit être d’épargner les vies humaines qui sont menacées, dans les zones densément peuplées, par l’effondrement de vieilles bâtisses dont certaines sont encore marquées «rouge», depuis le séisme de Boumerdès de mai 2003. Qu’y a-t-il aujourd’hui de plus urgent pour les autorités locales ? Consacrer leur temps à lancer le transport maritime Alger-El-Djamila et s’extasier devant cette «performance» qui est une navette banale ailleurs, ou l’occuper à prendre les mesures pour mettre à l’abri les familles qui vivent dans des situations de danger de mort ? Si on compare les discours prononcés par les responsables immédiatement après le séisme, sous l’effet du choc, et ce qui se fait par les autorités locales, on serait effaré par le poids de la routine et de l’incurie qui privent celles-ci de la faculté de discerner entre ce qu’il faut immédiatement faire, «toutes affaires cessantes», et ce qui peut attendre.
K. M.
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