Confusions néfastes
Par M. Aït Amara – Le concert de Sean Paul en Algérie a-t-il été annulé parce que le chanteur serait d’origine juive ou parce qu’il aurait fait l’apologie du sionisme ? Car les deux sont diamétralement opposés. Etre juif n’est pas une tare. Malheureusement, le poids de l’histoire coloniale aidant, nous avons tendance, nous autres Algériens, à vilipender la religion juive et à considérer le juif comme un ennemi avec lequel aucune amitié ni aucune réconciliation ne sont possibles. D’ailleurs, il n’est pas exclu que cet article soit perçu par certains comme un éloge panégyrique en faveur d’Israël, en ces temps durs, où nos frères palestiniens meurent chaque jour sous les raids criminels du gouvernement sioniste de Tel-Aviv. De même que toute critique de la doctrine sioniste raciste et expansionniste est souvent interprétée comme une attaque contre les juifs. Cet amalgame sciemment entretenu, au lieu d’attiser la haine entre les différentes communautés religieuses, devrait, au contraire, nous ouvrir les yeux sur les coups de Jarnac qui s’échafaudent dans les laboratoires secrets de toutes ces officines dont l’intérêt premier est de diviser les peuples pour régner sur le monde. L’histoire de la cohabitation entre juifs et musulmans est pourtant riche en littérature, tant des centaines de milliers de livres ont été écrits par des érudits des deux communautés, qui nous enseignent que les deux peuples ont de tout temps vécu en harmonie, chacun respectant les rituels et le mode de vie de l’autre. Que reproche-t-on exactement au chanteur Sean Paul ? D’avoir porté la kippa quelques minutes et de s’être rendu au Mur des Lamentations ? Quelle relation y a-t-il entre ces deux symboles de la religion juive et le sionisme ? Quelle relation y a-t-il entre un imam et un terroriste, une mosquée et une casemate ? Ne tombons pas dans le piège de la confusion volontaire qui a fait de tous les Algériens des porteurs d’une ceinture d’explosifs dans les années 1990 et qui nous a valu d’être mis en quarantaine, isolés du reste du monde, exclus de la communauté internationale, lorsque les autorités aéroportuaires françaises – par exemple – nous réservaient un sous-sol de l’aéroport d’Orly où les passagers au passeport vert subissaient un traitement vexant. Aussi étrange que cela puisse paraître, à cette époque-là, les Algériens partageaient cette «cave» avec les ressortissants israéliens qui avançaient côte à côte vers le portique de sécurité, se dirigeant chacun vers sa porte d’embarquement en s’évitant du regard, les uns tournant le dos aux autres. Eux voyaient en chacun de nous une bombe humaine, nous en chacun d’eux un criminel de guerre.
M. A.-A.
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