Affaire Sonatrach : Chakib Khelil et Farid Bedjaoui seront entendus par la justice italienne
Si elle est au point mort en Algérie, l’affaire de corruption Saipem-Sonatrach connaît de nouveaux rebondissements en Italie. Le parquet de Milan poursuit ses investigations afin de mettre la main sur tous ceux qui étaient impliqués dans l’opération de pots-de-vin en contrepartie de marchés juteux auprès de Sonatrach. Ainsi, selon l’agence britannique Reuters, qui cite des sources proches du dossier en Italie, l’ancien ministre de l’Energie et des Mines, Chakib Khelil, qui s’est exilé aux Etats-Unis, et le fameux «intermédiaire» Farid Bedjaoui seront entendus par les juges italiens dans cette affaire, mais en dehors du territoire italien. Selon la même source, les audiences auraient lieu dans une ville européenne. Probablement à Paris, à Vienne ou à Genève. La justice italienne a déjà lancé un mandat d’arrêt international contre Farid Bedjaoui. Détenteur de la nationalité algérienne, canadienne et française, Farid Bedjaoui est recherché pour «association de malfaiteurs finalisée à la corruption». D’après l’enquête menée par le parquet de Milan, il serait directement impliqué dans les contrats signés entre la compagnie italienne Saipem, filiale du groupe pétrolier ENI, et le groupe Sonatrach. En tout, sept contrats ont été obtenus en Algérie par Saipem entre 2007 et 2009 pour un montant total de huit milliards d’euros. Des contrats obtenus en contrepartie du paiement de «commissions» d’une valeur de 197 millions d’euros. En cavale pour échapper à deux mandats d’arrêt émis à son encontre en Algérie et en Italie, Farid Bedjaoui a été repéré récemment à New York où il coulerait des «jours heureux» loin des tracasseries judiciaires. Quant à Chakib Khelil, il est installé avec sa femme à Washington où il gère ses sociétés au Texas et fait du consulting international dans le domaine pétrolier et énergétique. Si la justice italienne affirme avoir programmé des audiences pour entendre Khelil et Bedjaoui, que fait la justice algérienne ? Va-t-elle relancer son mandat international contre Chakib Khelil et sa famille, après l’avoir annulé pour un vice de forme ? En effet, le 14 août 2013, le procureur général auprès de la cour d’Alger avait révélé que le juge d’instruction en charge du dossier Sonatrach 2 a lancé un mandat d’arrêt international au début du mois d’août contre neuf personnes dont Chakib Khelil, son épouse, leurs deux fils, Bedjaoui et trois complices présumés de ce dernier. La justice algérienne va-t-elle se laisser doubler dans cette affaire par le parquet de Milan qui semble avoir mis de gros moyens pour avoir les têtes de ceux qui étaient derrière ce gros scandale de corruption ? On ne le sait pas encore, même si l'on se réfère à la révélation faite au début 2014 par l’ancien ministre de la Justice, Mohamed Charfi, selon laquelle Amar Saïdani, lui avait demandé en septembre 2013 d’extirper le nom de Chakib Khelil du dossier Sonatrach en échange de son maintien au gouvernement. L’ancien ministre avait, bien entendu, préféré être éjecté du gouvernement plutôt que satisfaire la demande d’Amar Saïdani, qui n’était donc qu’un émissaire. Les attaques du secrétaire général du FLN contre le DRS visaient également à jeter le discrédit sur les enquêtes de ce corps de sécurité qui a fait éclater au grand jour les scandales de corruption à Sonatrach et dans l’autoroute Est-Ouest. Le rappel de ces faits est important pour montrer le manque de volonté du pouvoir algérien d’aller au bout de ce dossier. Mais qui arrêtera la justice italienne ? A la demande du parquet de Milan, deux immeubles sis avenue d’Iéna à Paris appartenant à Farid Bedjaoui et une villa sise à Ramatuelle (Var) immatriculée au nom de sa mère ont été mis sous scellés.
Hani Abdi