L’Etat privatisé ?
Par Kamel Moulfi – Invités, jeudi dernier, à dîner à l’hôtel El-Aurassi par Ali Haddad, candidat unique à la présidence du Forum des chefs d’entreprises, plusieurs ministres, une douzaine, dit-on, et le secrétaire général de l’UGTA, Abdelmadjid Sidi-Saïd, n’ont pas décliné l’invitation à cette mondanité d’un genre particulier et se sont déplacés pour applaudir son discours électoral destiné aux patrons, avant d’attaquer le méchoui dans la plus pure tradition. On ne peut pas penser que les membres du gouvernement étaient présents à la conférence d’Ali Haddad à titre personnel, ce qui pousse à se demander si l'on ne s'achemine pas tout simplement vers la privatisation de l'Etat, une sorte de seconde phase après l'utilisation ostentatoire de l'«argent privé» dans la campagne électorale d'avril dernier. Tous les observateurs ont noté qu’il s’agit, pour le FCE, d’une première et elle a dû rendre jaloux ses deux anciens présidents, Omar Ramdane et Réda Hamiani, qui n’ont jamais eu ces honneurs bien qu’ils aient eux aussi mis l’organisation patronale au service du pouvoir. Toutefois, cette connexion, plus ou moins maladroite, «pouvoirs publics-patronat» n’est pas nouvelle, avec cette différence que celle qui l’a précédée, il y a une quinzaine d’années, n’avait pas dépassé les limites du domaine privé même si elle a été par moment tapageuse, ce qui l’a peut-être fait échouer. Mais personne n’a oublié cette expérience. D’ailleurs, les mémoires ont été rafraîchies par la référence à l’ouverture du secteur bancaire et du secteur aérien, dans le discours électoral du candidat à la présidence du FCE. Quoi qu’il en soit, la couleur avait été annoncée par l’alignement forcé du FCE en faveur du 4e mandat de Bouteflika suivi par le départ du Forum de Slim Othmani et Issad Rebrab, opposés à l’instrumentalisation politique de l’organisation patronale, voire hostiles au 4e mandat. Pris dans l’ambiance festive, quelques médias ont brossé dans le sens du poil pour saluer cette nouvelle connexion dans un élan d’unanimisme factice qui n’est pas sans précédent lui aussi.
K. M.
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