Les véritables raisons des émeutes : les walis seuls face aux maffias locales ?

Plusieurs régions du pays sont secouées par des violences dues à des manifestations qui dégénèrent à cause, entre autres, de la répression policière. A Touggourt comme à Béjaïa, des citoyens, écœurés par les passe-droits et le favoritisme dont jouissent certains individus au bras long, ont exprimé violemment leur ras-le-bol. La raison de cette colère citoyenne : le logement et les lots de terrain. Deux «créneaux» fortement investis par des affairistes souvent structurés en véritables réseaux maffieux. Ces tensions cycliques sont le signe d’un profond malaise dans la société qui en a marre de subir le diktat des gros bonnets locaux qui se partagent à leur guise les richesses, faisant fi de la détresse de la population. Cette «maffia locale», dont on ne cesse de parler, sévit partout et défie les responsables aussi bien au niveau local que régional. Les walis se retrouvent souvent seuls face à ces réseaux maffieux, bien organisés et parfois soutenus par des gens très influents au sommet. Les cas de détournements des deniers publics, du foncier et des logements destinés aux citoyens lambda sont légion et restent souvent impunis. La presse nationale se fait l’écho de certaines affaires de pillage de l’argent public et de détournement de biens immobiliers et fonciers appartenant à l’Etat, sans que ce dernier réagisse à travers les différents appareils et institutions. Le wali, en sa qualité de premier magistrat de la wilaya, se trouve souvent mis en difficulté, subissant parfois même des menaces et de fortes pressions pour céder sur tel ou tel dossier. L’ancien wali d’Oran, Bachir Frik, qui a été condamné pour détournement et dilapidation de deniers publics, a bien décrit la position «fragile» du wali qui subit des formes de pression, à la fois de la maffia locale bien enracinée et du pouvoir central sans que ce dernier ne vienne à son aide en cas de difficulté. Certains walis flanchent comme c’est le cas de celui d’Annaba, Mohamed Mounib Sandid, qui ne semble pas avoir pu résister à la pression du travail, mais aussi à celles de gens qui ont le bras long et qui ont l’habitude de faire la pluie et le beau temps dans cette wilaya côtière, très connue aussi par sa maffia locale des plus dangereuses. Les marges de manœuvre des responsables au niveau des wilayas sont limitées. Et même munis d’une forte volonté de faire bouger les choses, les walis et d’autres responsables se heurtent rapidement à la dure réalité faite de passe-droits et de trafic d’influence, devenus monnaie courante dans notre pays. Et quand ça tourne mal, ils se retrouvent, seuls, sans appui ni soutien. Surtout que les besoins des populations sont de plus en plus importants. Leur colère aussi s’exprime de plus en plus d’une manière violente. Les exemples sont nombreux et les conséquences sont parfois dramatiques, comme c’est le cas à Touggourt où trois manifestants sont morts lors des derniers affrontements entre les forces de l’ordre et des citoyens protestataires contre la distribution frauduleuse de lots de terrain et de logements. Et ça ne s’arrêtera pas tant qu’on ne s’est pas attaqué à ces réseaux maffieux.
Rafik Meddour
 

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