Baisse du cours des hydrocarbures et problématique du crédit à la consommation en Algérie

L’Algérie a dépensé 55 milliards de dollars de biens et 12 milliards de dollars d’importation de services en 2013, soit 67 milliards de dollars, montant auquel il faut ajouter 5 à 7 milliards de dollars de transferts légaux de capitaux des sociétés étrangères, soit 72 à 74 milliards de dollars. La loi de finances 2015 prévoit 60 milliards de dollars d’importations de biens, soit 80 milliards de dollars dépensés. Or, Sonatrach, qui représente 98% des exportations, a réalisé une recette de 73 milliards de dollars en 2010/2011, 63 milliards de dollars en 2013 et certainement, comme je l’ai annoncé depuis plusieurs mois, entre 55 et 56 milliards de dollars fin 2014 et non 60 milliards de dollars comme annoncé par certains responsables. Avec un cours moyen de 70 dollars, les recettes de Sonatrach seront inférieures à 50 milliards de dollars. Avec un baril à 60 dollars, elles approcheront les 40 milliards de dollars. Alors que la loi de finances 2015 fonctionne sur un cours supérieur à 125 dollars, et ce, sans tenir compte des restes à réaliser importants du fait du divorce entre les objectifs et les moyens de réalisation, sources de surcoûts. Environ 70% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées sont assurés par les importations, tandis que le taux d’intégration de toutes les entreprises ne dépasse pas 15%, fonctionnant avec des matières premières et des équipements importés. Le tissu économique global est représenté à 83% par de petits commerces et les services. Le secteur industriel représente moins de 5% du produit intérieur brut et à l’intérieur de ces 5%, plus de 95% sont des PME-PMI peu initiées au management stratégique et non compétitives par rapport aux normes internationales en matière de coût et de qualité. Dès lors, la généralisation du crédit à la consommation gonflera la rubrique matières premières importées, et donc une accélération de la sortie devises, et constituera une rente pour ceux qui en bénéficieront. Il ne devrait concerner que les entreprises dont le taux d’intégration réel (matières premières et équipement) dépasse les 50%. Donc, attention aux effets pervers et aux impacts négatifs de la crise de 1986, bien qu’à la différence de cette période, l’Algérie a une dette extérieure faible et des réserves de change permettant de contenir les chocs à court terme. Mais avec un cours de 60/70 dollars, l’on ne peut tenir au-delà de quatre années au rythme de l’actuelle dépense, souvent sans contreparties productives avec des transferts sociaux et subventions généralisées et sans ciblage qui représentent 60 milliards de dollars, soit 27% à 28% du PIB, ce qui est intenable dans le temps. On ne doit pas gaspiller ces réserves qui doivent être utilisées pour réaliser cette nécessaire transition d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales, passant par une nouvelle gouvernance, la réhabilitation de l’entreprise créatrice de richesse et son fondement, l’économie de la connaissance. Mais avant tout, la mobilisation de toutes les forces de la nation qui doit reposer sur la morale de ceux qui dirigent la Cité, avec un discours de vérité, sans autosatisfaction ni sinistrose, devant donner l’exemple afin de rétablir la confiance, sans laquelle aucun développement ne peut se réaliser, surtout avec l’austérité qui s’annonce. Car ceux qui tenaient un autre discours d’autosatisfaction et aujourd’hui un discours de sinistrose pour voiler leur incompétence ne sont plus crédibles.
Abderrahmane Mebtoul
Professeur des universités, expert international en management stratégique
 

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