Réserves d’or en 2014 : pourquoi le même volume qu’en 2009 malgré l’exploitation d’Amessmessa ?
Les réserves d'or de l'Algérie sont restées stables au second semestre 2014 en s'établissant à 173,6 tonnes (24e place), soit de même niveau qu’au premier semestre de l'année dernière, selon le dernier rapport du Conseil mondial de l'or (CMO). L’agence officielle APS soulignait en juin 2014 que sur 100 pays, les Etats-Unis détenaient 8 133 tonnes, suivis de l'Allemagne (3 384 tonnes) et du FMI. Aujourd’hui, la même dépêche citant le CMO note également le même volume tant pour les Etats-Unis et l’Allemagne que pour l’Algérie qui se situerait à la 25e place, dénotant une relative stabilité. Or, dans deux contributions parues en 2009 et 2011 suite au rapport du CMO, je notais que l’Algérie arrivait déjà en 2009 à la 22e place mondiale et que 83% à 86% des réserves algériennes de change sont placées en bons du Trésor américain et en obligations européennes, alors qu’une fraction est déposée dans des banques internationales cotées dites AAA. Les intérêts engrangés (en fonction de l’évolution des taux directeurs des banques centrales et le délai du placement) fluctuent entre 4 et 4,5 milliards de dollars selon la Banque d’Algérie, supposant un placement à moyen terme. Pour déterminer la valeur intrinsèque du lingot d’un kilogramme d'or, il faut multiplier le prix de l'once d'or par 32,15, puis appliquer le taux de change euro/dollar. Le 8 juillet 2014, le gramme d’or se cotait en moyenne (fluctuation d’heure en heure) à 31,27 euros, soit 42,21 dollars. Pour 173,6 tonnes d’or, la valeur, en juillet 2014, serait d’environ 7,5 milliards de dollars. Le 27 février 2015, l’once d’or se cote 1 211,43 dollars, donnant pour l’Algérie un montant approchant les 7 milliards de dollars. Suivant le ratio du CMO, cela donne environ 4% des réserves de change actuelles, estimées fin 2014 à environ 185 milliards de dollars. La dépréciation d’environ de 30% de l’or entre 2009 et 2015 a également fait perdre plus de 2,5 milliards de dollars de sa valeur monétaire au stock algérien, que j’avais estimée, début 2011, à 9,75 milliards de dollars. Face à ces données récentes, l’opinion algérienne a besoin d’être éclairée sur la situation pour le moins paradoxale du stock algérien d’or, qui n’a pas bougé depuis 2009, alors que l’Algérie s’est lancée dans l’exploitation d’un gisement à Amessmessa, annonçant une production importante. En principe, les stocks d’or auraient dû augmenter suite au lancement de la production dans les gisements aurifères du sud du pays. Il serait souhaitable que le gouverneur de la Banque d’Algérie nous éclaire sur cette situation paradoxale à moins que l’exploitation de la mine d’or au sud du pays n’ait rien produit, contredisant les déclarations des différents ministres de l’Energie qui se sont succédé de 2009 à 2015 et qui avaient annoncé devant les caméras de la télévision algérienne et à l’APS une production importante. Le 30 janvier 2010, dans une déclaration à l’APS, le directeur général de l'Entreprise d'exploitation des mines d'or (Enor) avait déclaré officiellement, je cite : «Le gisement d'Amessmessa, situé à 460 km à l’ouest de Tamanrasset, va bénéficier d'un plan de développement avec pour objectif de hausser graduellement sa production aurifère à trois tonnes d'or annuellement. S'agissant des exportations de l'entreprise entre 2009 et 2010, elles ont été de l'ordre de 848,49 kg d'or, tandis que le marché local en a consommé seulement 208,78 kg.» La question qui se pose est : où est passée la production additionnelle de la mine d’or d’Amessmessa ? Toujours est-il qu’il faut éviter l’euphorie et préciser que la monnaie est avant tout un rapport social traduisant le rapport confiance Etat/citoyens, un signe permettant les échanges ne créant pas de richesses. Autrefois, les tribus d’Australie utilisaient les barres de sel du fait de sa rareté comme moyen d’échange. Au contraire, la thésaurisation et la spéculation dans les valeurs refuges comme l’or, certaines devises ou certaines matières premières, sont nocives pour toute économie. Avoir des réserves de change en devises ou en or est une condition nécessaire, mais sécuriser l’investissement et surtout éviter un dérapage plus important de la valeur du dinar par rapport aux devises, où existe une corrélation d’environ 70% entre la valeur actuelle du dinar et ce stock de devises via la rente des hydrocarbures, empêcherait que le dinar flotte à plus de 300-400 DA l’euro. C’est loin d’être une condition suffisante d’un développement durable et surtout provenant d’une rente éphémère, celle des hydrocarbures. Le problème central pour l’Algérie est de transformer cette richesse virtuelle en richesse réelle passant par un développement hors hydrocarbures, se fondant sur l’entreprise et le savoir, le tout conditionné par une nouvelle gouvernance.
Abderrahmane Mebtoul