Boudjerra Soltani : «Le pouvoir monopolise le nationalisme»
Boudjerra Soltani défend le droit de l’opposition à manifester dans les rues de la capitale et dénonce la répression du rassemblement organisée le 24 février contre le gaz de schiste et en soutien à la population d’In Salah. L’ancien président du Mouvement de la société pour la paix (MSP) juge, dans un entretien accordé au quotidien arabophone Echourouk, «abusif» le déploiement de la police à Alger pour faire face aux militants de l’opposition qui voulaient exprimer leur solidarité avec les militants anti-gaz de schiste du sud du pays et «casser le monopole du pouvoir» sur la fête de la nationalisation des hydrocarbures. Pour lui, «ce n’est pas la faute à la police mais aux dirigeants qui ont donné ordre d’empêcher un rassemblement pacifique». Boudjerra Soltani critique vertement le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, auquel il reproche d’avoir tenté de diaboliser l’opposition en la présentant comme un facteur d’instabilité pour le pays. «L’interprétation des intentions des gens n’est pas un comportement politique sain. Le monopole du nationalisme n’est pas un discours apaisant. Et lorsqu’on juge les gens sur leurs supposées intentions dans un discours officiel et de surcroît prononcé lors d’une fête nationale, cela s’appelle heurter la sensibilité des gens qui ont servi ce pays au pouvoir et continue de le faire aujourd’hui dans l’opposition», atteste-t-il, dénonçant ainsi les tentatives du pouvoir et de ses relais politiques de «diaboliser l’opposition en l’accusant de vouloir semer la fitna». Boudjerra Soltani insiste sur le nationalisme de ceux qui militent aujourd’hui pour faire changer les choses dans ce pays et le faire sortir de l’incertitude dans laquelle il s’enfonce depuis le fameux «Printemps arabe». L’ancien président du MSP, qui a soutenu le président Bouteflika jusqu’à 2012, appelle ainsi les partis au pouvoir à cesser de jouer la carte de «l’exclusion» et tendre un peu l’oreille à l’opposition pour arriver à un consensus qui permettra au pays de redémarrer sur de bonnes bases. Pour Soltani, le MSP a remis sur la table une initiative qui date de 2013 pour tenter de rassembler et non pas semer les germes de la division. «Le temps change les situations aussi. Mais ce qui ne peut pas changer, ce sont la paix et l’unité nationale», affirme-t-il. Soltani, qui évite de critiquer le président actuel du MSP, Abderzak Mokri, estime qu’il y a des forces «occultes» qui veulent pousser son parti à un affrontement direct avec le pouvoir. Ce qui n’arrivera pas, selon lui, car le MSP est un parti pacifiste. Commentant la récente sortie de Louisa Hanoune qui a critiqué notamment le chef de l’Etat et surtout un «cercle au pouvoir», Boudjerra Soltani affirme qu’«elle sait beaucoup de choses». L’ancien responsable du MSP lance cependant une pique à la secrétaire général du PT en disant qu’«elle ignore tout de l’islam». Quant à Amar Saïdani, secrétaire général du FLN, contesté, Boudjerra Soltani le considère comme un irresponsable qui «tourne le dos aux crises internes» qui secouent son parti.
Rafik Meddour