Benflis : «Le régime vit de la transgression de tous les droits»
L’ancien candidat à la présidentielle de 2014, Ali Benflis, attribue les inégalités et les injustices persistantes entre les hommes et les femmes comme le résultat d’un manque de volonté politique de «prendre à bras-le-corps» la revendication de leurs droits. Intervenant aujourd’hui lors d’une cérémonie organisée à l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la femme, Ali Benflis refuse de maquiller les graves carences démocratiques du pays par la défense de la cause féminine. «Je vous le dis avec beaucoup de sincérité et beaucoup de franchise, notre conception des droits de la femme et l’approche que nous proposons aux fins de leur prise en charge et de leur satisfaction sont aux antipodes de celles du régime politique en place», affirme le président du parti Talaiou El Houriyet. Ali Benflis refuse ainsi de chanter des louanges à la gloire de la femme pour couvrir une absence de volonté politique de prendre à bras-le-corps la revendication de leurs droits et leur donner une suite effective. «Nous n’abuserons pas de l’image de la femme et de la légitimité de ses demandes pour cacher toutes les autres tares d’un régime totalitaire ; nous ne ferons pas semblant de nous préoccuper sérieusement des droits de la femme alors même que partout ailleurs tous les droits politiques et civiques individuels et collectifs sont malmenés, bridés et brimés ; nous n’utiliserons pas la noble cause de la femme pour couvrir une agression politique caractérisée contre l’ordre constitutionnel comme cela a été le cas de la révision constitutionnelle de 2008 qui s’est révélée avec le temps si préjudiciable et si tragique pour notre pays ; nous ne ferons pas entrer des femmes dans un gouvernement qui ne gouverne pas ; nous ne ferons pas élire des femmes à un Parlement qui enregistre, mais ne légifère pas ; nous ne nommerons pas des femmes dans des institutions de l’Etat qui ne fonctionnent plus et qui, lorsqu’elles fonctionnent, se mettent aux ordres d’un régime politique et non aux ordres du peuple lui-même qu’elles sont censées servir», martèle-t-il. Pour lui, il est inadmissible de «réduire la noblesse du combat de nos concitoyennes pour leurs droits à une affaire de chiffres et à une opération statistique sans consistance, sans aucun sens et sans relation avec la réalité amère qui les contredit, mais que l’on exhibe à l’intérieur comme à l’extérieur de nos frontières comme autant de faux témoignages sur une modernité politique, économique et sociale à laquelle le régime politique en place tourne le dos et refuse de toutes ses forces d’en emprunter la voie». L’ancien chef du gouvernement, juriste de formation, considère qu’un régime totalitaire qui vit de la transgression de tous les autres droits ne peut respecter ceux des femmes. Aussi, estime-t-il, un régime politique qui relève d’un âge révolu ne peut incarner la modernité politique dont dépendent la promotion et la défense des droits de la femme. Comme, non plus, il est quasi impossible qu’un régime politique qui se mure dans le non-droit puisse être crédible lorsqu’il professe son attachement aux droits de la femme. «Reconnaissons ensemble et en une seule phrase qui résume à elle seule toutes les instrumentalisations de la cause de la femme aux fins particulières et étriquées du régime politique en place : ce régime politique n’est pas compatible avec la cause de la femme et il est la négation même de toutes les valeurs qu’elle porte», insiste le leader politique qui coordonne le Pôle des forces du changement. Ali Benflis explique sa vision au sein de Talaiou El Houriyet qui «diverge, assure-t-il, de celle du régime en place au sujet des droits de la femme». Il précise que son approche de ces droits est différente de celle du pouvoir et que sa démarche visant leur prise en charge réelle s’éloigne de celle que suit le régime en place. Il regrette que le régime en place n’en ait qu’une vision réductrice et calculatrice, celle de redorer son image et de faire oublier ses nombreux autres manquements en matière de libertés et de droits. «Notre approche est aussi volontariste et globale, celle du régime est timorée et sélective ; notre démarche est portée par des principes et des convictions, celle du régime par des calculs et des soucis égoïstes», conclut-il.
Rafik Meddour