Joe Pitts à Hillary Clinton : «Vous avez touché de l’argent marocain maculé de sang»
Dans une déclaration au journal américain Al-Monitor,le sénateur de Pennsylvanie Joe Pitts est revenu sur la somme perçue par l’ex-secrétaire d’Etat et candidate démocrate à la présidentielle, Hillary Clinton, au nom de la Fondation éponyme, par l'Office chérifien des phosphates (OCP), un organisme officiellement spécialisé dans les engrais, mais surtout dans l'exploitation des ressources minérales du Sahara Occidental et directement géré par Mohammed VI et sa famille. Une somme (un million de dollars) versée sous couvert de contribution au financement de l'Initiative mondiale Clinton en mai à Marrakech. Une sorte de kermesse qui sera conduite par l’ancien président Bill Clinton et qui mettra en vedette des dirigeants africains, notamment les présidents du Rwanda et de la Tanzanie. Dans une lettre adressée le 10 avril dernier à la Fondation Clinton, Joe Pitts s’adresse à l’ex-secrétaire d’Etat en ces termes : «Vous avez entendu parler des diamants de sang, mais à bien des égards, vous pourriez dire que l'OCP exporte du phosphate mélangé avec du sang !» Il lui explique que le Sahara Occidental «a été occupé par le Maroc pour exploiter ses ressources et l’OCP est l'une des principales entreprises impliquées dans cette action». Pitts fait partie d'une petite poignée de législateurs qui tentent de mettre à nu les desseins sordides de la diplomatie américaine et de son lobbying «massif» qui consiste à acheter des voix et à corrompre les responsables «en sortant le chéquier». Avec le président de la commission des droits de l’Homme à la Chambre des affaires étrangères, Chris Smith, ces législateurs demandent à la fondation de rembourser l'argent et d’arrêter carrément sa coordination avec cet organisme marocain corrupteur. Ils rappellent, à cette occasion, que selon une résolution des Nations unies votée en 2002, «l'exploitation des ressources naturelles des prétendus territoires autonomes, tel que le Sahara Occidental, n’est légale que si elle se fait au profit de la population locale». Ce qui n’est pas le cas du Maroc qui exploite à son seul profit les richesses sahraouies. Poursuivant son réquisitoire, l’auteur de la lettre rappelle une déclaration du roi Mohammed IV en 2014, à l’ONU, dans laquelle celui-ci prétendait que ce qui est produit dans le Sahara «n’est pas à même de répondre aux besoins fondamentaux de sa population». L’auteur de la lettre prévient que les Marocains pourraient faire pression sur le gouvernement américain parce qu’ils savent que Hillary Clinton «a des chances d'être élue présidente des Etats-Unis». «Ils veulent qu'elle soutienne leur occupation brutale du Sahara Occidental», explique-t-il. Il évoque le rôle joué par les groupes de lobbying Covington et Burling pour le compte de l'OCP, dont le PDG, Mostafa Terrab, «était lui-même un lobbyiste accrédité aux Etats-Unis jusqu'à l'année dernière», rappelle le commentateur d'Al-Monitor. Il était fonctionnaire à la Banque mondiale, relève-t-il. La lettre de Pitts a également soulevé des inquiétudes concernant la violation de l'accord de 2004 de libre-échange avec les Etats-Unis, au sujet des importations en provenance du Sahara Occidental. «Le Maroc et l’OCP cherchent clairement à lever toute restriction», s’indigne le sénateur de Pennsylvanie.
R. Mahmoudi