«J’ai acheté des stations de dessalement pour les Algériens» : le gros mensonge de Khalifa
En prenant connaissance des informations rapportées dans les comptes rendus de presse sur le procès Khalifa, à propos des projets de dessalement d’eau de mer qui s’ajoutent aux autres créneaux investis par Abdelmoumène Khalifa, on a l’impression que l’homme d’affaires déchu était un touche-à-tout. En fait, il s’intéressait à ce qui pouvait rapporter de l’argent. Au début de l’année 2000, en Algérie, la pénurie d’eau était telle et le niveau des réserves stockées dans les barrages ou souterraines était à un niveau si bas, que toutes les solutions avaient été envisagées dans l’urgence et le financement était forcément mobilisé dans ce but. Un budget conséquent était réservé pour faire face à la crise de l’eau, notamment pour l’installation de stations de dessalement d’eau de mer. Deux banques privées, de création toute récente à l’époque, Khalifa Bank et la BCIA, avaient senti le filon et affiché leur volonté de se lancer dans le domaine du dessalement d’eau de mer. Dans un article daté du 12 avril 2013, Algeriepatriotiqueétait déjà revenu sur l’aventure de Khalifa dans le dessalement pour rappeler que le groupe éponyme avait acquis à l’étranger, au début 2002, deux stations de dessalement qui auraient coûté, selon les estimations qui avaient circulé à l’époque, 200 millions de dollars. Ces deux stations de 1 500 m3/jour avaient été présentées comme un «don» du groupe Khalifa à l’Algérie. Elles avaient été importées d’Arabie Saoudite et installées au port de Zemmouri, près d’Alger. Elles passaient pour des stations fonctionnelles, certes anciennes mais qui pouvaient encore servir moyennant une opération de rénovation appropriée. Mais, selon des avis qui ne pouvaient pas être écoutés dans le contexte de l’époque, marqué par l’ascension de Khalifa et ses collusions multiples avec les gens du pouvoir, ces stations étaient, au contraire, destinées à la casse. L’eau dessalée qu’elles produisaient dans le port de Zemmouri était de mauvaise qualité et avait une odeur de gasoil à cause, selon l’explication de connaisseurs, des fuites dues à la vétusté de l’installation, qui déversaient du carburant dans l’eau de mer pompée pour être dessalée. Les habitants des localités proches du port de Zemmouri qui recevaient cette eau dessalée refusaient de la consommer. Une autre opération montée en Roumanie et en Grèce prévoyait l’importation de trois stations supplémentaires qui devaient être fonctionnelles fin 2002. Elles se sont avérées être en fin de vie après avoir longtemps servi dans un pays du Golfe. Que s’est-il passé dans cette affaire d’importation de stations de dessalement d’eau de mer par le groupe Khalifa ? Y a-t-il eu, comme des informations insistantes l’ont laissé entendre, transfert illicite de devises sous couvert d’achat de ces stations de dessalement à l’étranger ? Une somme évaluée à près de 70 millions de dollars comme le soulignait Algeriepatriotiquequi se référait aux résultats d’une enquête. D’après ce que rapporte la presse sur le procès en cours, face au juge qui a abordé le dossier des stations de dessalement d’eau de mer, dont Khalifa est accusé d’avoir détourné l’argent destiné à les acquérir, il a nié tout détournement. La suite du procès nous éclairera certainement plus sur cette affaire de stations de dessalement et permettra peut-être de savoir où sont partis les fonds destinés à acquérir ces stations. On sait que Khalifa n’était pas le seul groupe privé à s’intéresser à ce créneau ; la BCIA avait envisagé de s’y mettre aussi en projetant de faire installer par des entreprises étrangères trois stations de 80 000 m3/j chacune à Oran, Alger et Annaba, dont une devait être, à terme, «offerte» à l’Etat.
Houari Achouri