Abderrahmane Benkhalfa : «Il faut dévaluer le dinar et assécher le marché informel des devises»
En nommant Abderrahmane Benkhalfa à la tête du ministère des Finances, le gouvernement d’Abdelmalek Sellal semble décidé à jouer pleinement la carte de la rigueur budgétaire. Cet éminent expert en finances est bien connu dans le monde économique pour ses idées et ses recommandations pour une meilleure maîtrise des dépenses, une juste valeur du dinar et une révision de la gestion du marché des devises. Abderrahmane Benkhalfa s’est distingué ces dernières années par ses propositions qui visent à améliorer le marché financier et à mieux maîtriser l’inflation. L’une de ses idées phares qu’il n’a cessé de défendre ces derniers mois, c’est la valeur du dinar. Lors d’une interview qu’il a accordée en janvier dernier à Radio M, cet ancien délégué général de l’Association des banques et des établissements financiers (Abef) a affirmé que le dinar était surévalué. Abderrahmane Benkhalfa a suggéré, à l’époque, le traitement de la question de la parité du dinar. Pour lui, on ne peut pas rester les bras croisés face à une situation anormale qui est due au marché parallèle des devises. Cet expert financier, désormais ministre des Finances, considère ce marché parallèle des devises comme une sérieuse menace pour la stabilité de l’économie nationale. Il a préconisé la mise en place de plusieurs mesures pour limiter la dérive du dinar face à l’euro, en appelant à sa dévaluation. Mais pas seulement. Abderrahmane Benkhalfa a proposé d’accompagner cette dévaluation par des mesures d’assèchement du marché informel des devises en mettant en place des «paniers» de parité ou plutôt des taux de change multiples. Ainsi, la banque doit fournir la devise à des taux suivant la qualité du demandeur ou le but du voyage ou de la transaction. Car ce qui renforce le marché parallèle de la devise, c’est à la fois la différence importante du taux de change (106 dinars pour un euro en banque et 160 dinars pour un euro sur le marché parallèle) et le montant ridicule de l’allocation voyage (130 euros par an). Il ne faut surtout pas, pour lui, laisser l’écart entre le taux de change officiel et celui qui s’effectue au niveau du marché informel. Cet expert en finances a relevé également la nécessité de revoir l’allocation voyage pour la ramener à un niveau plutôt réaliste et éviter, de ce fait, que les citoyens aient recours au marché informel. Abderrahmane Benkhalfa va-t-il pouvoir mettre en pratique sa vision du secteur et apporter les ajustements nécessaires ? Va-t-il demander à la Banque d’Algérie de changer sa politique sur le dinar en cessant de le surévaluer ? On le saura bientôt. Abderrahmane Benkhalfa est également très attendu sur le terrain de la dépense publique effrénée. Avec la chute du prix du pétrole, qui s’inscrit dans la durée, le gouvernement n’a pas d’autre choix que de revoir à la fois le train de vie de l’Etat et le plan de l’investissement public. Abderrahmane Benkhalfa aura du pain sur la planche, surtout que la loi de finances complémentaire n’est pas encore finalisée.
Rafik Meddour