Maintenu au gouvernement malgré ses échecs notoires : quel est le secret de la longévité de Ghoul ?
Tous les ministres ayant remarquablement échoué dans leur gestion ou dont l’image a été ternie par des scandales ou des polémiques ont été remerciés, à l’exception d’Amar Ghoul. Il vient encore une fois de prouver qu’il était indétrônable. Repêché sans surprise dans le dernier remaniement, annoncé au beau milieu des procès en cascades qui auraient pu hypothéquer à jamais son avenir, Amar Ghoul n’a pas été rétrogradé, comme on l’aurait pensé, puisqu’il s’est adjugé trois portefeuilles à la fois : l’aménagement du territoire, le tourisme et l’artisanat. Trois secteurs dont on pourrait (pré)juger des résultats, au moins pour ce qui concerne le tourisme, dès la fin des vacances d’été qui approchent. Après son passage jugé catastrophique, à plus d’un titre, d’abord à la Pêche (1999-2002), où sa seule prouesse fut d’avoir aidé les islamistes de sa famille politique à garder le monopole sur ce secteur jusqu’au jour d’aujourd’hui, puis aux Travaux publics (2002-2013) et, enfin, aux Transports (2013-2015), où il a cumulé les scandales (affaire de l’autoroute Est-Ouest, crash de l’avion Swiftair affrété par Air Algérie, sévères critiques contre Air Algérie pour la médiocrité de ses services, accidents ferroviaires à répétition, etc.), l’homme s’en sort à chaque fois indemne. De caractère placide, il est imperméable à toute critique, affichant toujours le même air assuré et serein. C’est sans doute une «qualité» importante pour un homme politique qui ambitionne de se maintenir au pouvoir, dans une conjoncture aussi complexe à tous points de vue. En plus des qualités intrinsèques, lui et sa famille politique ont dû profiter des «bienfaits» de la réconciliation nationale pour s’imposer comme acteur incontournable dans l’Exécutif et dans tout le paysage politique national, depuis l’avènement de Bouteflika à la tête de l’Etat. Il faut alors croire que l’homme a les faveurs du chef de l’Etat, auquel il doit cette longévité record au gouvernement. Mais le Président aurait-il accepté de lui assurer la couverture même dans les affaires scabreuses dans lesquels il est cité ? Peu probable. Faut-il chercher sa puissance dans des soutiens de lobbies politico-financiers liés à l’économie informelle par exemple ? On sait que, dans leur politique d’entrisme, les disciples de Mahfoud Nahnah appliquent une vraie stratégie de conquête du pouvoir. Le parcours d’Amar Ghoul constitue sans doute l’exemple le plus accompli. Seul leader d’obédience islamiste au gouvernement, depuis le retrait du MSP, il a mis son nouveau parti, TAJ, au service du Président et de la coalition gouvernementale, à travers sa participation à toutes les élections. Aux législatives de mai 2012, la liste qu’il a conduite à Alger a raflé 30% des voix. Ses prouesses électorales l’ont certainement boosté jusqu’à se propulser sur une scène politique totalement chamboulée, qui voit les principaux partis islamistes traditionnels (le MSP, Ennhada, le Front du changement et le PJD d’Abdallah Djaballah) basculer dans l’opposition. Une situation qui fait bien son affaire. Mais est-ce son seul secret ?
R. Mahmoudi