Un drame national
Par Meriem Sassi – Lors de son audition par le tribunal criminel de Blida, le liquidateur judiciaire, Moncef Badsi, constitué partie civile, a souligné qu’il a «œuvré à limiter l’ampleur du désastre qui aurait pu se transformer en "drame national" si le groupe Sonatrach avait procédé à des placements». M. Badsi n’a certes pas tort en estimant que les dégâts ont été circonscrits pour ce qui est de l’affaire Khalifa, mais le fait de dire qu’il n’y a pas eu drame national est très discutable. Le mal fait à l’économie nationale est tellement profond que les répercussions risquent de porter préjudice au pays sur plusieurs générations, tant les malversations et la corruption, qu’elles soient représentées par les affaires Khalifa, Sonatrach 1 et Sonatrach 2, ou l’affaire de l’autoroute Est-Ouest, ont ébranlé l’image des entreprises algériennes et saigné l’économie. Les scandales liés à l’argent du pétrole dilapidé pendant des années par des responsables corrompus sont sans conteste «un drame national» et ce ne sont pas quelques procès-fleuves qui permettront de tourner la page et d’oublier les préjudices subis par les Algériens dans leur ensemble. C’est un drame national vécu par les millions d’Algériens honnêtes qui tiennent, malgré leur situation sociale parfois difficile, à leur patriotisme et à l’abnégation au travail, et qui se cramponnent malgré tout à l’héritage laissé par les martyrs qui ont donné leur vie pour l’indépendance et la dignité de leur peuple. Une dignité aujourd’hui foulée aux pieds par des corrompus en tous genres, qui s’enrichissent illicitement sans état d’âme au détriment de l’économie du pays et des intérêts de ses enfants. M. Badsi affirme avoir constaté des «actions de pillage» qui se sont poursuivies jusqu’à la liquidation de Khalifa Bank, enclenchée en 2003, visant à limiter l’ampleur du «désastre». Force est de constater malheureusement que ce n’était que la partie visible de l’iceberg, car les dégâts engendrés par la gestion mafieuse de certaines entreprises, accompagnée de transactions et marchés douteux , à l’ombre des plans quinquennaux généreusement dotés depuis plus de dix ans, se révèlent incommensurables. C’est d’autant plus difficile à admettre que la crise due à la baisse des recettes du pays est aujourd’hui à nos portes, et que ceux qui n’ont pas su prévenir la corruption pour préserver les deniers du peuple se tournent aujourd’hui vers lui pour lui demander de croire aux vertus de l’austérité.
M. S.
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