Le puzzle
M. Aït Amara – Ainsi, l’alliance présidentielle sera ressuscitée et passera de trois à quatre partis. Les images de Belkhadem, Soltani et Ouyahia qui nous ont si longtemps accompagnés durant les premiers mandats de Bouteflika vont revenir, avec un léger lifting. Les deux principaux partis sont toujours là, mais il ne reste qu’un seul rescapé de l’ancien mariage politique de raison. La machine a donc été remise en marche bien avant le prochain rendez-vous présidentiel, prévu en 2019, et tout indique que les contours de cette nouvelle configuration avaient été esquissés bien avant le quatrième mandat du président Bouteflika. C’est que la force du système algérien réside dans sa vision à long terme qui lui permet de s’auto-entretenir en dépit des aléas, quels qu’ils soient, politiques, économiques, sécuritaires ou géostratégiques. Le maintien d’Abdelaziz Bouteflika au pouvoir malgré sa maladie handicapante devait inexorablement être accompagné par des mesures parallèles pour parer à toute éventualité. Si l’objectif des décideurs est normalement de mener le quatrième mandat à son terme, il n’en reste pas moins que l’état de santé du Président devait inciter les initiateurs de cette stratégie – audacieuse, il faut l’avouer – à mettre en place un plan de rechange au cas où un imprévu quelconque venait à se produire entretemps. La reconfiguration du schéma politique, qui consiste en quatre éléments perceptibles jusque-là, participe de cette logique. Les premiers indices du premier élément ont été observés ce 30 mai à la coupole du 5-Juillet, où Amar Saïdani a été plébiscité non pas par les militants du FLN, mais par le premier collège électoral : le président de la République, l’Exécutif conduit par le Premier ministre, les deux chambres du Parlement et l’ensemble des institutions officielles. Le second élément a consisté en l’agrément du parti d’Ali Benflis, principal rival du candidat Bouteflika lors de la dernière présidentielle et dont l’absence de la scène politique aurait réduit à néant la crédibilité du pouvoir quant à sa volonté de garantir des «élections propres et honnêtes» et ouvertes à tous ; contrairement à Louisa Hanoune, Ali Benflis ne traîne pas la réputation de «lièvre» et d’«agitateur sur commande». Le troisième élément a commencé à se mettre en place il y a plusieurs mois et s’est concrétisé, hier, avec le retour d’Ahmed Ouyahia aux commandes du RND, après la démission unanimement souhaitée d’Abdelkader Bensalah. Le retour de l’ancien chef du gouvernement se veut fracassant, puisque le revenant Ahmed Ouyahia entame sa reprise en main de la seconde formation politique du pays par une confrontation avec les journalistes ; un exercice que celui que la rue appelle «l’homme des sales besognes» affecte particulièrement, contrairement au taciturne Bensalah. Le quatrième élément a consisté en l’appel, dans la minute qui a suivi sa désignation, à la constitution d’une nouvelle alliance présidentielle à quatre, dans laquelle siégeront les deux anciens partis, auxquels s’ajouteront un substitut du MSP tendance démocrate et un succédané du RCD à coloration nationale. En attendant d’autres mesures à venir, les pièces du puzzle sont posées l’une après l’autre qui, une fois assemblées, composeront le visage du futur président.
M. A.-A.
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