Passer d’une économie de casino à une économie productive
Par Abderrahmane Mebtoul – La sphère financière doit être au service de la sphère réelle. Faute d'une véritable révolution culturelle pour inculquer l'esprit d'entreprise et libérer l'ensemble des énergies créatrices, par une lutte sans merci contre la bureaucratie néfaste qui produit la sphère informelle, contrôlant entre 40 et 50 milliards de dollars de la masse monétaire en circulation, la refonte du système financier, socio-éducatif et la libéralisation du foncier, il ne faut pas s'attendre à l'émergence d'entrepreneurs dynamiques en Algérie, qui doivent produire en termes de coûts et qualité, tenant compte d'une économie de plus en plus mondialisée. La dominance de la mentalité spéculative a un effet négatif sur le développement dans la mesure où pour tout développement fiable, le capital argent doit se transformer en capital productif. Ce qui m'amène à analyser cette concentration également excessive du revenu spéculatif au niveau mondial. La suprématie de la sphère financière spéculative sur la sphère réelle et les distorsions entre les profits spéculatifs en hausse, pas ceux de véritables entrepreneurs créateurs de richesses durables, sans oublier la détérioration de notre environnement par un modèle de développement et consommation énergétique qui a besoin d'une transformation face à une population mondiale est d'environ sept milliards d'âmes et allant rapidement vers 10 milliards, expliquent largement l'essence de cette crise. Afin de protéger la banque des activités, certains experts préconisent de séparer les banques de dépôt des banques d'investissement. Les banques seraient autorisées à user de l'épargne qu'elles ont en dépôt pour prêter aux ménages, aux entreprises et à d'autres banques, mais ne devraient plus être autorisées à acheter des titres comme l'achat d'actions ou toute acquisition de produits financiers titrisés. C'est dans ce cadre qu'il y a lieu globalement de repenser tant les actuelles relations économiques et politiques internationales que l'actuelle politique socioéconomique en Algérie reposant sur les rentes spéculatives afin d'éviter du replâtrage en ne s'attaquant pas à l'essence de la crise. Privilégier comme dans les années 1970 une tendance protectionniste serait néfaste à terme, du fait de l'interdépendance des économies (mondialisation) et l'apparition de nouveaux acteurs (pays émergents d'où le passage du G7 au G20). Les fondateurs de la science économique, disons l'économie politique, Smith, Ricardo, Karl Marx et plus près de nous Schumpeter, Keynes ont écrit la valeur, c'est-à-dire comment extraire de la valeur provenant du travail, condition sine qua non de la richesse des Nations. Actuellement existe une crise de la théorie économique qui influe sur les politiques économiques, les politiques étant tétanisées face à l'ampleur de la crise mondiale, n'ayant plus de référence, expliquant les tâtonnements et l'absence de vision stratégique en ce monde turbulent en perpétuel mouvement. La reprise économique mondiale en cours, étant encore fragile, on ne peut pas exclure l'hypothèse d'une rechute dans les prochaines années, s'il advenait que la dépense publique se ralentisse et que la croissance ne soit pas reprise par l'entreprise privée productive, et ce, à mesure de l'atténuation de l'impact des mesures de relance budgétaires et monétaires sur la croissance. Il y a urgence pour l'Algérie, maillon faible de l'économie mondiale, d'un renouveau qui implique plus de réformes de fond et non des replâtrages, car l'équilibrisme ou statu quo est suicidaire. L'on doit s'attaquer à l'essentiel et non au secondaire, avec plus de moralité, surtout des dirigeants qui doivent donner l'exemple, et plus de justice sociale qui ne saurait signifier égalitarisme source de démotivation. Je ne saurai trop insister sur les relations dialectiques entre la morale (l'éthique) et le développement souvent négligées par les économistes, expliquant largement d'ailleurs les révoltes sociales récentes tant dans le monde arabe que dans les pays développés, d'où l'urgence d'une nouvelle gouvernance mondiale et locale par une réelle décentralisation pour une participation citoyenne. La concentration des revenus en faveur des couches spéculatives destructrices de richesses, le manque de visibilité dans les politiques socioéconomiques et la dominance des rentes deviennent inquiétants. Il s'agit de réhabiliter l'économie de la connaissance et l'entreprise créatrice de richesses publique ou privée, locale ou internationale, qu'il s'agit de démystifier. Le véritable nationalisme des Algériens en ce XXIe siècle se mesurera à leur capacité de contribuer à la valeur interne, dans un monde turbulent et incertain où de profonds bouleversements géostratégiques s'annoncent avec des menaces sérieuses, nécessitant des stratégies d'adaptation tant politiques, militaires qu'économiques. On ne peut continuer, avec la baisse du cours des hydrocarbures qui sera de longue durée, verser des salaires sans contrepartie productive, non maîtriser la gestion par des surcoûts exorbitants, des projets sans impacts réels et généraliser les subventions à l'ensemble de la société sans ciblage, sans risquer de conduire le pays au même scénario de 1986. C'est la condition de la création d'emplois productifs afin d'atténuer les tensions sociales. En économie, le temps ne se rattrape jamais, n'existant pas d'équilibre en soi. Pour Albert Einstein, point de vue que je partage, je le cite : «La vie, c'est comme la bicyclette : il faut toujours avancer pour ne pas perdre l'équilibre (…) et la valeur d'un homme tient dans sa capacité à donner et non dans sa capacité à recevoir.»
A. M.
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