Normalisation culturelle
Par Kamel Moulfi – Les artistes marocains sont, assurément, bien vus en Algérie. D’abord, on peut constater comme une «invasion» culturelle sur les différents médias officiels, radio et télévision notamment, où des chansons marocaines passent en boucle depuis plusieurs semaines. Hier, au Festival du film arabe d'Oran, c'est un film marocain qui a été primé. Dans quelques jours, le mercredi 17 juin, la version algérienne de la fête de la musique, une création française (l’originale aura lieu le dimanche 21 juin 2015 à Paris, sur le parvis de l’Institut du Monde arabe), aura comme vedette le chanteur marocain Aziz Sahmaoui qui est déjà passé à la télé. La version marocaine de la fête de la musique a été purement «nationale», puisque du 9 au 12 juin, c’est l’Orchestre philarmonique du Maroc qui a produit, en plusieurs points du territoire, des concerts gratuits en plein air (ouverture d’opéra, airs connus, fusion avec des airs de musique arabo-andalouse), pout tous. On le voit, s’il y a une normalisation culturelle, sur fond de fête de la musique, elle n’est pas dans les deux sens. Bien sûr, personne, en Algérie, n'a rien contre les artistes marocains, mais cette profusion soudaine intrigue. Prépare-t-on l'opinion publique algérienne à une éventuelle réouverture de la frontière ? Ceci étant, l’ouverture de notre pays aux artistes marocains n’est pas en contradiction avec les principes qui fondent les relations avec le Maroc. Notre ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, l’a suffisamment souligné à maintes reprises pour qu’il y ait un doute sur les bonnes intentions de l’Algérie en la matière, malgré les provocations répétées du Makhzen, comme l’illustrent la profanation du drapeau algérien, à Casablanca, en novembre 2013 et l’incident à la frontière entre les deux pays, en octobre 2014. En vérité, le Maroc vit comme un cauchemar l’activité diplomatique de l’Algérie particulièrement en Afrique, et veut y répondre par une stratégie de la tension alimentée par le Makhzen. La cote accordée aux artistes marocains par l’Algérie, pour désamorcer la tension et, en même temps, le soutien apporté au peuple sahraoui dans sa lutte pour son droit à l’autodétermination et à l’indépendance, font partie de la même politique algérienne.
K. M.
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