Dumas à propos de l’affaire d’espionnage : «Le comportement des Américains ne me choque pas»
L’ancien ministre des Affaires étrangères français, Roland Dumas, s’est dit «surpris», mais pas «choqué» par l’affaire des écoutes téléphoniques organisées par les services secrets américains pour espionner les présidents français Chirac, Sarkozy et Hollande. «Je ne suis pas choqué par le comportement des autorités américaines, mais je suis surpris», a, en effet, déclaré Roland Dumas à la chaîne de télévision anglophone russe Russia Today. L’ancien ministre des Affaires étrangères sous François Mitterrand a, à ce propos, appelé à la vigilance «vis-à-vis des Américains», affirmant qu’il a toujours soutenu que la France était «sur le mauvais chemin dans [ses] relations avec la Russie» et qu’il fallait qu’elle «change de méthode dans [ses] discussions avec nos amis russes». «Nous devons changer notre politique. C’est en partie la faute de la France, car quand nous avons rejoint le commandement intégré au sein de l’Otan, il fallait s’attendre à une onde de choc et c’est ce qui vient de se produire aujourd’hui», explique Roland Dumas qui estime que la réaction de la France ne sera pas forte : «Il n’y a pas de doute que le gouvernement français va réagir, mais sa réaction sera faible, car la France est en position de faiblesse dans sa relation avec les Etats-Unis.» Pour Roland Dumas, la France «a perdu sa liberté de décision dès lors qu’elle a décidé de faire partie du commandement intégré» de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord. Nostalgique de l’époque du général de Gaulle, l’ancien chef de la diplomatie française souligne la nécessité d’une riposte de Paris : «Il faut qu’il y ait une réaction très forte comme celle du général de Gaulle dans les années 50 et 60, lorsque les relations entre la France et les Etats-Unis traversaient une crise similaire. Mais je suis conscient que de Gaulle n’est plus de ce monde et qu’il est mort depuis fort longtemps.» Dumas use ainsi d’une métaphore pour décrire la position de faiblesse de la France d’aujourd’hui face à l’hégémonie américaine. Roland Dumas avait appelé, en avril dernier, dans une interview à Algeriepatriotique, à engager une «grande réflexion» et «un grand débat» en France sur la politique étrangère de l’Elysée. Il avait rappelé la situation en Libye qui est «dans un état lamentable» depuis l’intervention de la France dans ce pays et l’«éviction» de Kadhafi. «Une erreur», selon ce diplomate chevronné qui s’est «toujours battu pour que la France maintienne des relations avec la Libye de Kadhafi» et «négocie avec Bachar Al-Assad» en Syrie. Mais il n’a été écouté ni dans l’un ni dans l’autre dossier dans lesquels la France a mis deux régions du monde dans une situation d’instabilité et d’insécurité.
Karim Bouali