Développement des NTIC en Algérie : l’ARPT et Algérie Télécom rament à contre-courant
Le Conseil d'Etat vient de désigner un expert suite aux saisines de trois opérateurs internet contre une décision de l'ARPT ayant instauré en 2012, contre toute logique économique, une «redevance imposable de 10% à la fourniture de tous les services et équipements utilisant la technologie WiMax et hertzienne» à travers sa décision n°18/PC/ARPT/2011 du 18 juin 2012. Une des saisines concernait, en particulier, l’annulation du nouveau mode de calcul du chiffre d’affaires opérateur au titre de l’exploitation de l’autorisation relative à la fourniture des services de la voix sur Internet Protocol. Les opérateurs internet WiMax que sont Anwarnet, Icosnet et SLC viennent ainsi de remporter une première victoire contre l’acharnement de l’ARPT à vouloir depuis quelques années leur imposer des tarifs et des conditions d’exercice contraignantes susceptibles d’asphyxier leur activité. Un sort que beaucoup d’opérateurs ont connu par le passé au vu des contraintes multiples auxquelles ils ont été confrontés dans un secteur offrant pourtant de grandes potentialités d’expansion et favorisant l’émergence des entreprises, comme c’est le cas dans beaucoup de pays à travers le monde. En Algérie, l’ARPT voit apparemment les choses autrement et rame à contre-courant des opportunités offertes par le segment des nouvelles technologies. En admettant que la décision de l'ARPT mérite d'être «révisée» par un expert, le Conseil d’Etat abonde dans le sens des trois opérateurs qui ne comptent pas se laisser faire et réclament que justice leur soit rendue. Les trois opérateurs ont déjà porté à la connaissance de la presse et de l’opinion publique les tracasseries auxquelles ils sont soumis. Pour illustrer les prix prohibitifs appliqués par l’opérateur historique national, une lecture comparative entre les offres d’Algérie Télécom (AT) avec un opérateur européen montre une différence de prix sidérante. En effet, les prix appliqués par Algérie Télécom sont presque dix fois plus chers que l’opérateur Orange, objet de la comparaison. Une politique tarifaire justifiée, selon des experts interrogés par Algeriepatriotique, par la pléthore d’employés de l’entreprise qui emploie 27 000 personnes alors qu'elle n'aurait besoin que de 11 000 personnes. Malgré cela, cette entité a continué à recruter, puisque son effectif est passé de 22 000 à 27 000 durant ces quelques dernières années. Anwarnet, Icosnet et SLC avaient signalé que suite à la décision n°18/PC/ARPT/2011 du 18 juin 2012, ils se trouvaient dans l'obligation d’appliquer ladite redevance à toute fourniture de services et équipements utilisant la technologie WiMax et hertzienne à partir du 1er août 2012. «Tout en nous élevant avec force contre cette décision unilatérale, non objective et contraire à la politique des pouvoirs publics algériens en matière de démocratisation de l’usage d’internet, nous avons décidé de porter l'affaire auprès du Conseil d’Etat», affirmaient alors les opérateurs signataires du communiqué qui ajoutaient qu’«ils ne ménageraient aucun effort pour empêcher, par toutes les voies légales, cette énième mesure arbitraire qui pénalise les consommateurs, compromet l’essor des TIC et met en péril la survie des quelques rares acteurs qui subsistent encore». Anwarnet, Icosnet et SLC relèvent les aberrations de l’ARPT. Les trois opérateurs ont informé également l’opinion publique qu’ils se sont mis d’accord contre une décision arbitraire et abusive mettant en péril l’équilibre économique de leurs entreprises et qu’il n’a jamais été question d’une entente sur la tarification finale des services aux publics. Les opérateurs ont, par ailleurs, dénoncé les pratiques du régulateur du secteur des télécommunications qui ont eu pour effet la disparition de la quasi-totalité des ISP (fournisseurs d’accès à Internet), l’absence d’offres concurrentielles pour le grand public, les tarifs d’accès à Internet parmi les plus élevés au monde, le classement de l’Algérie parmi les derniers pays au monde concernés par le test en matière de débit Internet, selon les analyses faites sur sa bande passante durant la période du 23 janvier 2012 et le 9 juin 2012 ainsi qu’une détérioration constante du classement de l’Algérie qui n’a cessé de reculer pour rejoindre la queue du peloton, selon le Global Information Technology Forum de la Banque mondiale. Il est clair que la troïka constituée du ministère des TIC-AT-ARPT a constitué une entité commune et travaillé contre le développement des TIC en Algérie. L’enchevêtrement des prérogatives des responsables qui se sont succédé à la tête du secteur est un indice des incohérences qui ont conduit à la situation actuelle. Benhamadi et Derdouri sont passés d’AT pour le premier et de l’ARPT pour la seconde au poste de ministre des TIC. Par ailleurs, si le problème des TIC n’a jamais été réglé à ce jour en Algérie, c’est parce que les ministres qui se sont succédé ont toujours menti et n’ont jamais permis une discussion sérieuse au sein du gouvernement pour développer le secteur. On attend de voir ce que fera la ministre actuelle. Algeriepatriotique reviendra sur ce sujet sensible des NTIC en Algérie dans le cadre d’un dossier spécial qui s’étalera sur plusieurs parties.
Meriem Sassi