Le rêve bidon
Par M. Aït Amara – Antoine de Maximy, c’est ce Français qui se pavane de pays en pays, muni d’une mini-caméra accrochée à l’épaule et qui va dormir chez l’habitant, pour s’imprégner de sa culture et de ses traditions. Partout où il va, il est accueilli avec le sourire par des populations pauvres mais généreuses, reçu par des familles qui vivent du strict minimum mais qui ont le cœur sur la main. Partout, sauf aux Etats-Unis, le pays de la «liberté» et du «rêve». Transcription d’une discussion à New York entre Antoine de Maximy et des Américains vivant dans la ville la plus prestigieuse du monde. Antoine de Maximy est, dès l’abord, conseillé par un New Yorkais, qui tente vainement sa chance à un jeu de grattage :
– Soyez prudent !
– Pourquoi ?
– C’est New York…
– New York c’est une belle ville, non ?
– A New York, il peut se passer de drôles de choses.
Quelques pas plus loin, le Français est interpellé sur un ton menaçant par un autre New Yorkais :
– Tu me filmes ? T’es qui toi ? Pourquoi tu me filmes ?
– Je suis français, je filme…
– Tu viens de France ? Tu filmes quoi ?
– Je filme mon voyage…
– T’as pas l’air…
– Je n’ai pas l’air de quoi ?
– Je ne t’ai pas vu regarder ailleurs ; tu viens directement ici.
– Parce que mon hôtel est juste là. Et toi, qu’est-ce que tu fais ?
– On se méfie des caméras.
– Pourquoi ?
– C’est comme ça. Pourquoi tu filmerais un inconnu ?
– Eh ben, c’est quand même un bon moyen de se rencontrer…
– Non, je ne crois pas.
– Tu ne veux pas me connaître ?
– Non !
– Pourquoi ?
– C’est comme ça…
A quelques encablures de là, un autre citoyen, dont Antoine de Maximy – qui avoue se sentir mal à l’aise – pense qu’il n’a plus toute sa tête, lui fait néanmoins une leçon d’anthologie sur ce qu’est le «rêve américain» :
– Le tournage est déjà fini ?
– Non, il commence tout juste. Et toi, qu’est-ce que tu fais, tu te balades ?
– Moi, je ne fais rien. J’ai pris une retraite précoce… à l’âge de 25 ans.
– Ah bon ?
– Oui, je suis retraité. Tout ce système est bidon.
– Bidon ?
– C’est le Père Noël qui l’a imaginé, ce système. Oui. Le riche s’enrichit, le pauvre s’appauvrit. Le voilà le système.
– Et toi tu es du mauvais côté…
– C’est pour cela que j’ai pris ma retraite.
– Et tu as pris ta retraite à 25 ans !
– A 25 ans, oui…
– Et avant, qu’est-ce que tu faisais ?
– J’attendais la retraite. Et puis je me suis dit pourquoi l’attendre ? Autant la prendre. On passe notre vie à travailler… pour ne plus travailler.
– Tu vis où ?
– Je vis dans la rue ; j’y vis depuis que je suis retraité. C’est ça l’Amérique.
Et notre New Yorkais de lancer un long rire sardonique. Comme pour railler cette Amérique là. La vraie. Pas celle de Disney et de Kerry.
M. A.-A.
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