A qui le tour ?
Par Houari Achouri – Alors qu’il n’y avait rien dans l’air qui l’annonçait, immédiatement au lendemain d’un Conseil des ministres, la veille du week-end et, de surcroît, en pleines vacances estivales, le limogeage de trois membres de l’Exécutif, dont l’un, Amara Benyounès, se comportait comme un acteur majeur dans le gouvernement, confirme l’imprévisibilité de ce qui est décidé en haut. Ou bien nos médias et leurs journalistes spécialisés ne voient plus venir les choses dans la vie politique, comme s’il leur manquait l’essentiel dans leur métier ou qu’ils l’auraient perdu ; cette qualité d’anticipation qui fait la différence et installe leur notoriété. Ils en sont, après-coup, comme tout le monde, à s’interroger sur les objectifs auxquels obéissent les changements. Et s’il n’y en avait aucun, à part celui de cacher la léthargie au sommet de l’Etat ? Oui, cela pourrait tout expliquer : créer de l’animation en jetant du grain à moudre aux commentateurs qui se chargeront de donner l’impression que «ça bouge». En passant à la télévision, après ce mini-remaniement, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, n’a pas cru nécessaire d’apporter le moindre éclairage à la décision prise par le Président. On ne peut pas croire qu’il n’était pas en mesure de le faire. De leur côté, depuis quelque temps, les ministres, une fois libérés de leur mission, ne communiquent pas ou si peu. Pourquoi cette chape de plomb ? Une telle manière de gérer les affaires de l'Etat achève de discréditer les institutions déjà fragiles et empêche les membres du gouvernement de remplir leur mission dans la sérénité, car il n'est pas dit qu'ils seront épargnés par ces décisions à l'emporte-pièce qui semblent moins répondre à une stratégie qu'à des considérations claniques. Sitôt nommés, sitôt dégommés. C’est le sort de Khomri et Kadi. Il n’y a plus l’assurance de la longévité exceptionnelle qui a fait le bonheur de plusieurs ministres. Le siège, maintenant, est devenu éjectable, sauf si l'on s’appelle Amar Ghoul. Et en quittant le gouvernement, ce n’est pas la sinécure, à l’étranger, à la tête d’une ambassade, qui est offerte aux ministres démis de leurs fonctions. C’est, au mieux, dans une wilaya, sur le terrain, qu’ils attendront que, d’en haut, on les rappelle… par surprise, comme on les a enlevés.
H. A.
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