Des poètes marocains font signer à des Algériens un appel à la «normalisation» à partir de Constantine

Profitant d'une manifestation organisée dans le cadre de «Constantine, capitale de la culture arabe 2015», intitulée : «Nuit de la poésie» consacrée au Maroc, des poètes algériens et marocains présents ont signé un appel insidieux à l'ouverture des frontières fermées depuis 1995. «L'appel de Constantine» était préparé par le responsable de cette festivité, Bouzid Harzallah, poète d’expression arabe, connu aussi pour son activisme panarabe et sa proximité avec le royaume du Maroc où il est très souvent invité. Selon les échos qui nous sont parvenus de Constantine, Harzallah aurait réservé un traitement spécial à ses hôtes marocains en guise de reconnaissance pour leurs invitations fréquentes. Au nom de «la longue lutte commune contre le colonialisme», les signataires estiment que les deux peuples ont suffisamment de ressources pour restaurer «notre destin commun pour un avenir Maghreb uni et plus éclairé», et que «si la politique et ses vicissitudes ont quelques raisons d’attiser les animosités passagères (…), nous les poètes et écrivains des deux pays, réunis en cette "nuit de la poésie marocaine", ici à Constantine, nous nous occupons de l’essentiel qui constitue l’existence de nos peuples». L’appel est signé, du côté algérien, par Bouzid Harzallah, Mohamed Bentalha, H’mida Ayachi, Abderrezak Boukeba, Ahmed Abdelkrim, Abdesselam Yekhlef et Lamis Saïdi, et du côté marocain par Yassine Adnane, Imène Khattabi, Mohamed Salhi et Sabah Doubi. Si cet appel est passé inaperçu en Algérie, ce n'est pas le cas au Maroc, où la presse s'en est fait un large écho, considérant que les écrivains et poètes algériens se sont «rebellés contre le pouvoir en place qui refuse toute normalisation avec le Maroc», présenté ici comme une victime. En plus de toutes les marques de «fraternité» démesurées et intéressées, ce cercle des poètes a dédié cette nuit de la poésie marocaine à Tahar Benjelloun, dont la dernière estocade portée contre l’Algérie a soulevé une vague d’indignation dans l’opinion algérienne. Dans un article lapidaire, paru fin juillet dernier, Benjelloun a usé d’un ton trivial et menaçant qui achevait de dévoiler ses véritables desseins et sa véritable vocation – celle d’un agent du Makhzen : «Quand vous avez un voisin, a-t-il écrit, dont le plaisir est de vous créer des ennuis et de vous empêcher de vivre en paix, au lieu d’entrer en guerre avec lui, vous déménagez. Mais il existe des situations où cette solution sage n’est pas possible.» On se demande comment les responsables algériens chargés de cette manifestation culturelle – au plus haut niveau – n’ont pas eu le réflexe de s’opposer à cet hommage rendu à un personnage qui voue tant de haine pour l’Algérie. Car il y a indiscutablement, ici, un manquement impardonnable pour des responsables censés renvoyer la meilleure image qui soit de leur pays, à plus forte raison lorsqu’il s’agit d’intrusion de la propagande marocaine. On sait que ce type d’actions participent d'une campagne insidieuse menée ici par une cinquième colonne qui a infiltré les rouages de l'Etat et n’hésite pas à afficher sa proximité avec le royaume alaouite et à en exhiber les mots d’ordre, profitant d’une certaine liberté d’expression dont jouissent les médias algériens. C’est ainsi que des chansons marocaines passaient en boucle depuis plusieurs semaines sur les radios algériennes avant qu'une instruction ne soit venue interrompre une vraie campagne de propagande, destinée à occuper des espaces dans l’esprit du public algérien, et à y ancrer sournoisement une certaine idée de «communion» et de «normalisation» avec le Maroc.
R. Mahmoudi
 

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