Une contribution de Youcef Benzatat – Gaza plage à Tel-Aviv sur Seine
Je n'étais pas à Gaza ce jour-là
Ce jour-là tout le monde a vu ce que j'ai vu
Sans être à Gaza ce jour-là toute l'humanité a vu
Ce jour-là devant leurs téléviseurs tous les enfants du monde entier ont vu
Horrifiés devant les images de la plage, ce jour-là tous les enfants ont vu
Ils ont vu tout ce que les adultes, les soldats, les politiciens et moi-même avons vu
Je n'étais pas à Gaza ce jour-là
Ce jour-là tout le monde a vu ce que j'ai vu
Sans être à Gaza ce jour-là toute l'humanité a vu
Ce jour-là devant leurs téléviseurs tous les enfants du monde entier ont vu
Horrifiés devant les images de la plage, ce jour-là tous les enfants ont vu
Ils ont vu tout ce que les adultes, les soldats, les politiciens et moi-même avons vu
Toute l'humanité a vu sur les écrans des téléviseurs
Ce que moi-même et les poètes avons vu et oublié depuis
Ce que les adultes, les soldats et les politiciens avaient vu et oublié aussi
Pourtant je n'étais pas à Gaza plage ce jour-ci
Je n'étais pas à Tel-Aviv non plus
Ce jour-ci je voulais aller chasser de ma mémoire l'obscène
Je me rendis alors à Tel-Aviv sur Seine
Je voulais flâner sur les berges du fleuve pour chasser de mon cœur meurtri sa peine
Et m'oublier entre les flots de la mer de Lutèce et les vagues incessantes de ses hôtes venus de l'humanité entière
Je voulais communier avec Tel-Aviv pour retrouver son humanité
Communier pour mentir à ma profonde blessure sur sa douleur
Je voulais communier pour chasser de mon cœur meurtri sa rage
Je voulais et je voulais tant oublier l'horreur
Et pour mon malheur je me suis retrouvé à Gaza plage
Comme un couteau remuant dans ma plaie
Avec son rappel insolent que rien ne saurait me faire oublier ma peine
Serait-ce même Tel-Aviv sur Seine
Rien ne pourrait me consoler de ma peine devant ces images obscènes
Y compris même mon poème inséré entre les images de l'écran du téléviseur
Youcef Benzatat