Prière à portée politique
Par Kamel Moulfi – Il est devenu fréquent sur la Toile de tomber sur des photos ou des vidéos montrant des scènes de prières collectives effectuées sur des plages en Algérie, ou dans un pays voisin, par des groupes de baigneurs qui ne veulent pas attendre la fin de journée pour remplir ce devoir religieux à la mosquée ou à la maison. Ce fait inhabituel prend une dimension spectaculaire sur les grandes plages très fréquentées où il a tendance à se développer très rapidement, même s’il ne concerne qu’un petit groupe encore limité d’estivants tout en étant, par ailleurs, totalement inexistant sur le reste du littoral. Il ne s’agit pas, de toute évidence, d’un acte anodin, strictement religieux, et qui serait donc uniquement une somme d’initiatives individuelles, «isolées», comme on dit. Au contraire, il n’est pas exagéré de penser que sa signification est dans la portée politique que veulent donner à cette action ses initiateurs, conçue et certainement préparée et organisée comme une manifestation au même titre que les autres formes connues qui ont été engagées à la fin des années 1980, notamment à travers le port du kamis et de la barbe, chez les hommes, et le hidjab ou le jilbab chez les femmes. En se singularisant de cette façon, par rapport aux autres, sur la plage, comme il y a une trentaine d’années dans les rues et les commerces, les auteurs de cette «innovation» cherchent sans doute à produire un effet d’entraînement en exploitant encore une fois la crédulité des gens, pour en tirer un bénéfice politique. Il ne faut pas que cette initiative déborde et touche à la liberté des autres baigneurs, et notamment les femmes qui vont à la plage pour le moment de détente et de loisirs qu’elle procure. En trente ans marqués par l’expérience dramatique du terrorisme, les Algériens ont appris la leçon et savent à quoi s’en tenir. Ils ont en fait la preuve, tout récemment, par le mouvement populaire, chez les jeunes particulièrement, de condamnation du terrorisme après l’embuscade d’Aïn Defla qui a coûté la vie à neuf soldats de l’ANP. Dans la société algérienne d’aujourd’hui, ils sont nombreux les gens qui ne se limitent pas à «contempler» ce que font les islamistes et à commenter l’«inaction» du gouvernement face à leurs agissements. Heureusement !
K. M.
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