Le monde cocufié
Par M. Aït Amara – L’ONU, espionnée par le géant américain des télécommunications AT&T, nous fait le coup du «oh, regarde ce qui se passe par là-bas !». Cocufiée – c’est le mot – par son hébergeur internet, cette organisation internationale qui sert de couverture juridique aux puissants dans leurs actes d’hostilité contre les plus faibles, s’est fendue d’un communiqué sur la «barbarie primaire» du régime syrien qui a commis un «crime horrifiant» au moment même où Edward Snowden, l’ancien employé indiscipliné de la NSA, a révélé que les Etats-Unis fliquaient tous – absolument tous – les courriers électroniques reçus ou envoyés à partir des Nations unies. Les maîtres du monde nous ont habitués à cette gymnastique mentale qui consiste à orienter notre regard dans le sens contraire de ce que nous devons scruter. L’ONU nous invite à oublier ce viol caractérisé commis par les services secrets américains et de pleurer les morts «tués par Bachar Al-Assad» sur un marché près de la capitale syrienne, selon, bien sûr, l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), poupée en costume cravate fabriquée par la CIA pour encercler la Syrie diplomatiquement, le combat au sol étant confié à l’autre poupée en tenue afghane, Daech. Si les responsables de l’ONU ont eu recours à ce dribble, c’est parce que cette affaire de craquage des boîtes aux lettres officielles de l’organisation concerne tous les pays qui en sont membres ; toute la planète, en somme. Les frasques des Etats-Unis, un pays irrémédiablement atteint d’espionnite et de guerroyite, apparaissent au grand jour grâce à un homme qui prouve, ainsi, que cette superpuissance, gendarme incontesté du monde qui représente la première et plus grande monocratie sur terre, est fragile et vulnérable ; aussi précaire et inconsistante que ces dictatures arabes dont l’incroyable longévité fut démythifiée en un claquement de doigts. Et si Vannina Maestracci, une des porte-parole de Ban Ki-moon, a parlé d’«inviolabilité», c’est que le tripotage de la NSA doit bel et bien être perçu comme un viol et que, partant, les Etats-Unis devraient – au conditionnel – répondre de ce voyeurisme pervers dont ont été victimes 192 Etats sur les 193 que compte l’ONU. Mais que peuvent les nations quand la ligue qui les unit est consentante ? Une éphémère lamentation à côté de l’armada destructrice déployée contre un petit pays prospère comme la Syrie, coupable d’avoir repoussé le violeur et refusé la défloraison imposée au reste du monde.
M. A.-A.
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