Mauvais présage
Par R. Mahmoudi – La brusque dégradation de la situation sécuritaire dans le nord du Mali et le danger terroriste qui a atteint, cette semaine, un seuil inquiétant en Libye n’ont pas signé la mort du processus de paix dans ces deux pays, parrainé simultanément par Alger. Mais il est clair que tout doit être remis à zéro. Les observateurs les plus avisés avaient dès le départ averti que la chose était loin d’être une sinécure. Face à des protagonistes roublards et versatiles, il est, en effet, difficile de garantir une paix durable. A commencer par l’attitude des rebelles de l’Azawad. Il en va ainsi du double jeu de la Coordination du mouvement de l’Azawad (CMA) qui a ratifié les accords de paix à Alger, puis à Ouagadougou, mais dont les hommes, sur le terrain, n’assument pas leur position et accueillent tous les groupes opposés aux dits accords. De son côté, le gouvernement malien n’a jamais donné de gages pour l’application des clauses de l’accord signé à Alger, dont celle de l’octroi d’une large autonomie administrative et politique aux populations du Nord et, de ce fait, n’hésite pas à y semer la zizanie et alimenter les tensions sous couvert de milices incontrôlées, comme cela s’est passé à Kidal lundi dernier. Finalement, tous les protagonistes ont trouvé leur compte dans ce nouvel accès de violence qui, à la longue, ne profitera qu’aux groupes terroristes qui infestent cette région du Mali. Repoussées momentanément après leur razzia de 2012, Al-Qaïda et ses nombreuses procréations locales sont prêtes à tout moment à réoccuper le territoire qu’elles n’ont jamais réellement quitté. Le même phénomène se présente en Libye, où les deux gouvernements rivaux font mine d’accepter les propositions de bons offices pour trouver un terrain d’entente, mais qui, sur le terrain, dressent chaque jour de nouvelles barricades et grossissent les rangs de leurs milices. Leurs divisions sont telles qu’ils ont abandonné tout un territoire (entre les deux capitales, Tobrouk et Tripoli) aux groupes armés les plus sanguinaires se réclamant de Daech, qui y multiplient les massacres et occupent les points stratégiques de ce nouvel «émirat» en gestation. Les ennemis traditionnels de l’Algérie, comme des oiseaux de mauvais présage, se sont empressés d’annoncer «l’échec de l’initiative d’Alger», comme si cela allait faire avancer le projet de la paix en Libye et dans la région.
R. M.
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