Remaniements inédits au sommet de la hiérarchie militaire : Bouteflika prépare-t-il son propre retrait ?
Avec le départ du chef du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le général de corps d’armée Mohamed Mediène, dit Toufik, mis à la retraite, est-ce le début d’une nouvelle «ère» pour les institutions qui dirigent le pays ? Certains observateurs le pensent. Ils voyaient même venir ces événements. Dans ce scénario, ils n’excluent pas que, à court terme, on assisterait à d’autres mises à la retraite qui répondraient à cette logique de transition d’une période à une autre. Dans ce cas, on devrait s’attendre, selon eux, au départ de ceux qui n’ont pas encore été touchés par cette vague, mais qui sont maintenus pour, justement, organiser cette passation de relais tant redoutée dans l’opinion publique. Le président de la République, ministre de la Défense nationale, qui procède à ces changements, a nommé «M. Athmane Tartag, chef du Département du renseignement et de la sécurité», précise un communiqué de la Présidence. Doit-on comprendre que cette nomination s’inscrit dans la logique d’une transition qui pourrait aboutir, par exemple, à la nomination d’un civil à la tête d’un service de renseignement en Algérie ? Certes, le nouveau chef du DRS, qui était jusqu'à ce jour conseiller auprès du président de la République, est un général-major à la retraite et avait auparavant assumé plusieurs hautes responsabilités au sein des services de renseignement et de sécurité, comme le rappelle le communiqué de la Présidence. Contrairement à ce qu’affirme Ahmed Ouyahia, en tant que chef du RND et directeur de cabinet du président Bouteflika, ces changements appellent de nombreuses lectures et l’une d’entre elles concerne le changement, pour ne pas dire la rupture par rapport à ce qu’il y avait avant, c'est-à-dire tout ce qui a été bâti durant au moins deux décennies, celle de 1990, la «noire», et celle qui l’a suivie. Le changement concerne forcément des personnes, mais aussi, sans doute, les conceptions, pour les adapter à ce que l’on appelle les nouveaux défis auxquels l’Algérie n’échappe pas. Ces défis imposent la modernisation sur tous les plans des services de renseignement et de sécurité. La question qui se pose est de savoir si cette mutation se fait sur fond de luttes de clans au sommet et pour les besoins de cette lutte ou si, comme le dit Ahmed Ouyahia, il n’y a pas de conflit au sommet de l’Etat et tout se passe normalement. Pour ce qui va venir, en l’absence de transparence suffisante dans le fonctionnement des institutions de ce type, les spéculations vont bon train évidemment. L’une d’elles concerne l’idée que le président Bouteflika préparerait son départ en dessinant un paysage institutionnel nouveau dans le secteur de la défense nationale, services de renseignement compris. Il faudra attendre d’autres indices pour mieux prospecter l’avenir immédiat et voir si, effectivement, le changement de personnel ne fera pas d’exception parmi ceux appelés à prendre leur retraite.
Kamel Moulfi