Un militant marocain arrêté pour avoir dévoilé les violences du Makhzen contre les réfugiés syriens
Le militant marocain des droits de l’Homme Saïd Chramti a été arrêté pour avoir diffusé une vidéo dans laquelle il recueille le témoignage de réfugiés syriens victimes de maltraitances dont se sont rendus coupables des policiers marocains, à la frontière nord du pays. «Le royaume du Maroc poursuit la persécution des défenseurs des droits humains et ignore les conventions internationales», dénonce ce militant qui a posté la vidéo gênante pour le régime de Rabat. Dans la vidéo en question, des réfugiées syriennes accusent les services de sécurité marocains de maltraitance à la frontière de Beni-Ansar. Elles certifient avoir été battues ainsi que leurs enfants en bas âge par les policiers du Makhzen. Saïd Chramti, qui préside l’association Grand Rif pour les droits de l’Homme, a été incarcéré à la prison locale de Nador et condamné à 18 mois de prison par la justice marocaine. Son arrestation remonte au 12 février 2014. Il est accusé d’avoir soutenu les réfugiés syriens qu’il aidait à passer la frontière pour accéder à la ville espagnole de Melilla. Son avocat avait estimé que la peine dont a écopé son client était trop lourde et qu’il ne comptait pas en rester là, interjetant appel du verdict et réfutant toute implication de Saïd Chramti des accusations qui lui ont valu son emprisonnement, notamment une supposée agression contre un policier marocain. Ce que l’accusé a toujours nié. Le procès a été reporté à maintes reprises en raison de l’absence du policier en question, rapportent des médias marocains qui se réfèrent à des défenseurs des droits de l’Homme indignés par «la contradiction de ce procès avec le net progrès réalisé par le Maroc dans le domaine des droits de l’Homme ces dernières années». Ils accusent le régime de Rabat de priver les régions de Nador et du Rif de cette «avancée démocratique» sous le prétexte de la «subversion». Saïd Chramti a été inculpé pour «trouble à l’ordre public», «atteinte à la sécurité des personnes et des biens publics», «menace contre des agents de l’ordre», «outrage à un corps constitué», «complicité d’émigration clandestine», «incitation à la violation de la loi par le biais d’appels et de déclarations subversives», «port d’arme pendant la manifestation», «participation à un attroupement non autorisé avec port d’arme», «incitation à l’insoumission des agents de l’ordre» et «diffusion de fausses informations susceptibles d’attenter à l’ordre public». Un chapelet d’accusations qui dénotent un procès politique qui ne pouvait déboucher que sur un verdict expéditif.
Karim Bouali