L’animosité du système rentier
Par Mohamed Benallal – La question du pouvoir d'achat s'est imposée de force dans le débat public (souks, cafés et magasins). Si le pouvoir d’achat empêche de remettre en cause la consommation, il enferme néanmoins les forces sociales dans la revendication timide pour un toujours plus. Par conséquent, la décroissance par manque de revenus n'est pas de se serrer la ceinture (austérité), mais d’inventer un nouveau pouvoir via une implosion ou explosion de l’ordre décroissant. Il y a la politique de la rente, l’économie basée sur la rente, le social nourri par la rente et la culture soignée par la rente ; cette gamme suscitée est représentée par des actions multiples combinées, sans oublier la force «constituée. Pour pouvoir mettre fin à cette situation contextuelle nonchalante et aller droit vers le bien-être, il suffit de :
– chasser l’argent du secteur politique vers le secteur économique ;
– d’établir de nouvelles réglementations plus strictes dans le secteur financier (secteur bancaire) ;
– d’éliminer toutes les renardières fiscales et parafiscales ;
– limiter les pouvoirs des lobbies ;
– rétablir les pouvoirs civils (Etat civil) confisqués par le système dictatorial ;
– renforcer la séparation des pouvoirs.
«Il faut que les principes d'une politique soient faits de justice et de vérité.» Citation.
Une des premières conditions à prévoir serait l’assainissement et le renforcement des administrations centrales régionales et locales, des institutions, des organismes et des entreprises économiques en leur attribuant la compétence et l’intégrité humaine. Ceci nécessite bien entendu de mettre tous les moyens nécessaires sur la formation théorique et pratique dans l’ensemble des secteurs et administrations qui composent un Etat qui respecte bien entendu le droit, les règles et la morale. D’autant plus que le personnel existant actuellement dans le pays, le mieux qualifié et le plus compétent se voit avec la proportionnelle et les 32 ans partir fatalement à la retraite, laissant la place à ceux qui n’ont pas encore les connaissances requises et qui se trouvent balancés dans les structures étatiques (gouvernementales, administratives, économiques, financières et judiciaires), occupant des postes immérités, n’ ayant pas les connaissances, la morale et les pratiques requises. Il faut aussi d’autres obligations :
– l’action qui consiste à enlever tous les obstacles tels que la corruption, la bureaucratie, les mesures de blocage, les actions contre-productives, de désordre, d’indiscipline, les lacunes…
– savoir gérer le pays par des normes et des standards stricts.
A partir de ces principes de base énumérés, se cultivent la bonne gouvernance, la transparence, la prudence, l’efficacité et la rigueur, qui lubrifient la machine de la régence qu’elle soit de gauche, de droite, de centre, ou de n’ importe quelle couleur politique.
Les gens qui nous gouvernent sont actuellement en train de modifier légèrement les règles existantes et limiter les excès, sinon les abus ; ils pourraient nous faire croire par tout moyen médiatique que ce pouvoir rentier a réalisé quelque chose d'utile, de nécessaire, mais au fond, ce n’est qu’un sentiment illusoire. Le problème est que les petites réformettes ne servent qu’à pérenniser une situation rentière issue de ressources naturelles vierges, prêtes à être exploitées, une énergie abondante facile à extraire et une population complice avec peu de dettes externes pour l’instant et beaucoup de dettes improductives internes( Ansej, pêche agriculture et autres services touristiques….). C'est un contexte optimisé par une croissance à une seule variable de propulsion maléfique qui est la rente pétrolière, alors qu’il existe tant de moyens et de main-d’œuvre disponible qualifiée. D’autre part, des richesses ont été dilapidées (corruption, détournements, mauvaise gestion, non-respect des règles, injustice, etc.), les mauvais investissements sont monnaie courante, exemple des montages où le taux d’intégration ne dépasse pas 10%, un gaspillage sinon un détournement pur et simple, sinon un transfert gratuit de devises (capitaux) au profit des oligarchies.
Remarque importante : dans les années 70, le taux d’investissements dépassait souvent les 50%, le taux d'intégration avoisinant les 55%. Cette situation faisait croître le taux de croissance jusqu’à deux chiffres parfois. Les limites négatives du modèle obsolète (modèle rentier), un contexte optimisé pour la croissance, commence avec peu de dettes. La dette, comme nous le savons, est une façon de consommer aujourd'hui les revenus futurs, lorsqu’on parle d’économie créatrice de valeurs et non de «bazardisation». Car dans une économie créatrice de richesse, si par exemple d'un revenu de 1 DA on peut tirer 10 DA de dette, le travailleur qui gagne 20 000 DA peut consommer 200 000 DA de biens et de services aujourd'hui, ou acheter 200 000 DA d’actifs (nouvelle forme d’accumulation élargie du capital). Lorsqu’ on parle de contexte économique de richesse optimisé pour la croissance, il doit être optimisé pour tous les agents économiques en l’occurrence les banques. Celles-ci en général gagnent de l'argent à mesure que la dette augmente (intérêts composés ou service de la dette) et les rentrées fiscales de l’Etat augmentent aussi à mesure que la productivité, le commerce et les bénéfices augmentent. La finalité du système rentier nous permet de dire haut et fort : préparez-vous à l'implosion interne ou bien à l’explosion externe sinon à la fulmination de ce système rentier. Le second thème ne sera pas explicité, car il présente des facteurs relevant de la stratégie exogène. Pour ce qui concerne l’implosion endogène :
– lorsque le pays pour lequel la «bazardisation» a été optimisée ne peut plus s'étendre par le tarissement de la rente pétrolière (diminution du prix du pétrole et diminution des exportations) ;
– lorsque les revenus des travailleurs cessent d'augmenter ;
– lorsque l’inflation cesse de diminuer ;
– lorsque la valeur du dinar se déprécie sans cesse ;
– lorsque les prix des biens et services s’envolent et les pénuries réapparaissent ;
– lorsque l’Etat ne peut plus honorer les subventions de biens de première nécessité ;
– lorsque la dette interne finit par cesser d'augmenter (mais ses remboursements se font via le FMI), ce qui signifie que la consommation (c'est-à-dire la «croissance» pour ceux qui créent la richesse) cesse d’augmenter.
Le pays est en train de passer d'une économie rentière (bazardisation) sans fin à une déchéance humiliante. Le système qui dépend entièrement de la rente est condamné à une fulmination qu'aucune réforme ne permettra d'éviter dans les jours, mois et ans à venir. Les bonnes politiques sont celles qui reconnaissent la vertu et le mérite comme unique force. Car ceux d’aujourd’hui ne pensent et ne vous parlent que business, finances, commerce, richesse et luxe.
M. B.
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